Cet article vous présente 5 axes de travail pour réaliser des prises en charge diététiques plus efficaces, fun, agréables et motivantes, non seulement pour les patients, mais aussi pour les diététicien·ne·s !
Article co-écrit par :
Elise Bricoult, diététicienne agréée, indépendante depuis 2009
Diplômée de l’Institut Paul Lambin (IPL) en 2008, co-responsable du Groupement des Diététicien·ne·s Indépendant·e·s (GDI)
Co-Fondatrice :
- Diet’ en Transition, formations en ligne pour diététicien·ne·s indépendant·e·s
- LudiConsult : des jeux tout prêts pour des consultations diététiques plus ludiques
Nicolas Portetelle, Co-Fondateur de Diet’en transition
Diététicien·ne indépendant·e : quel beau métier ! Le côté indépendant nous permet d’organiser nos journées comme on le souhaite, sans “chef” pour nous dire quoi faire. Cela nous permet aussi de jouir d’une totale liberté sur la manière dont nous prenons en charge nos patient·e·s (durée, structure, tarifs, etc).
Mais cette profession vient aussi avec de nombreux challenges et défis à relever, pas forcément présents il y a 10 ou 15 ans. Selon moi, il y en a 3 principaux.
Le premier est l’apparition d’autres professions (telles que nutrithérapeutes, coachs en nutrition, nutritionnistes, etc.) proposant soi-disant des services similaires à ce qu’un·e diététicien·ne pourrait fournir.
Le deuxième est le développement galopant d’internet. Ce dernier, combiné avec la popularisation des smartphones est devenu la source n°1 d’information où l’on y trouve tout et son contraire en matière de nutrition.
Et enfin le troisième, est l’environnement actuel. Nous vivons dans un monde où tout est extrêmement rapide voire instantané : les livraisons, la messagerie, les distractions permanente, etc.
La tendance globale est la “gratification immédiate”. Nous voulons tout et tout de suite. Il n’est donc pas facile d’embarquer nos patients sur des changements durable et sur le long terme.
Pour toutes ces raisons, nos prises en charge doivent évoluer, nous devons nous réinventer. Non seulement pour maintenir la pérennité de notre entreprise, mais aussi pour améliorer, dépoussiérer l’image de la profession de diététicien·ne auprès du grand public.
La meilleure manière de faire cela, c’est de proposer des prises en charge de qualité dit « au TOP » pour nos patients, de faire des campagnes d’information ou publicitaire afin de revaloriser notre métier.
Nous allons nous pencher sur 5 éléments clés pour construire un système de prise en charge au TOP pour nos patients.
Si vous avez 5 min, je vous encourage à réfléchir profondément à cette question.
En effet, durant nos études, ce sujet n’est que très peu évoqué voire pas du tout.
A la sortie de notre cursus, nous sommes des expert·e·s du “quoi”. C’est-à-dire que nous savons ce qui doit être changé dans l’alimentation de nos patient·e·s une fois le problème exposé.
Si nos patient·e·s étaient des petits robots, il suffirait alors simplement de leur dire quoi faire. Ils exécuteraient alors tout à la perfection et les résultats seraient au rendez-vous dans 99% des cas. En pratique, c’est parfois loin d’être le cas. Chaque patient·e a sa “vie” avec ses contraintes personnelles / professionnelles, ses émotions et ses imprévus.
Tous ces éléments constituent des obstacles à l’implémentation de nos conseils.
Une prise en charge au TOP, doit donc faire en sorte de maximiser les chances d’implantation sur le long terme (quelques mois, voire plusieurs années).
Seule cette approche sur le long terme va permettre d’ancrer en profondeur des nouvelles habitudes qui amèneront les patient·e·s vers leur autonomie tout en maximisant les bénéfices pour leur santé physique et psychologique.
Nous pourrions nous poser la question suivante : “Mais alors comment peut-on faire pour maximiser les chances d’implémentation ? “
D’après moi, la réponse peut tenir en 4 points :
Certains d’entre vous trouverons cette liste triviale, et je vous l’accorde, mais (tout comme avec nos patient·e·s), savoir quoi faire, ce n’est que la première étape.
Le plus difficile, c’est d’appliquer cela systématiquement, à chaque consultation.
Le mot “systématiquement” est important ici. Trop souvent, nous attendons d’avoir un·e patient·e en difficulté pour le motiver ou remettre nos conseils et autres plans alimentaires en question.
Pour que les prises en charge se passent du mieux possible, il faut faire preuve de proactivité et intégrer systématiquement ses principes au cœur de nos routines et de nos structures de consultations.
J’ai construit mon système de prise en charge autour de 5 principes, 5 grands axes qui structurent ces prises en charge diététiques. Dans la suite de cet article, nous allons les détailler un à un.
Un peu de contexte… Au début de ma carrière, je faisais des consultations de 30 minutes. Si tout se passait bien pour mon patient, s’il n’avait pas de questions ni de difficultés particulières, après 15 minutes, nous avions fait le tour du sujet. Et mon gros malaise, était de lui demander de payer le plein tarif pour 15 minutes de “blabla”.
Vous aussi, vous avez peut-être tendance à vous concentrer uniquement sur les faits que vos patient·e·s vous racontent, à débriefer, à tenter de résoudre quelques problèmes et à vous arrêter là… Comme expliqué plus haut, nous nous devons aussi de transmettre des connaissances diverses comme, par exemple :
Ce que je vous propose c’est d’aménager un temps défini en consultation pour faire avec chaque patient une activité qui va l’aider dans son parcours pour devenir autonome.
Mes activités thématiques sont construites en 3 temps. Le premier temps est l’exposition des croyances. Le deuxième temps est la déconstruction des “mauvaises ou fausses” croyances. Et ensuite le troisième, l’introduction des nouvelles informations qui formeront de meilleurs comportements.
Trop souvent, on oublie les 2 premières étapes, alors qu’elles sont les plus importantes. C’est à ce moment-là que vous allez découvrir ce qu’il y a dans la tête de votre patient et découvrir les sources de certains comportements.
Pour faire cela, posez des questions ouvertes à vos patients tel que “Pourquoi mangeons-nous de la viande ?”.
Ce qui est très productif, c’est de proposer un exercice ou des jeux. Cela crée un réel espace où l’on peut se vider la tête et faire des erreurs, le tout très naturellement sans malaise ni côté patient·e, ni côté diététicien·ne.
En pratique j’ai choisi de faire des consultations de suivi qui durent 45 min. Les dernières 15-20 minutes sont réservées à une activité thématique ou un jeu.
Bref, peu importe le thème que vous abordez, le but est de faire sauter quelques fausses croyances, de rendre la consultation fun et ludique et d’aménager les conseils à la vie et aux contraintes du·de la patient·e d’une façon efficace et extrêmement naturelle.
Afin d’introduire ce second principe, je vous propose deux petites analogies pour vous aider à mieux ressentir ce qu’un patient peut ressentir quand il commence un suivi diététique.
1/Imaginez que quelqu’un vous invite à une réunion, mais qu’il ne veuille pas vous dire avec qui, ni en quoi cela va consister, ni ce que vous allez y faire.
Quel serait votre niveau d’enthousiasme à vous rendre à cette fameuse réunion ? Si ce jour-là vous vous sentez fatigué ou qu’il neige, est-ce que vous vous y rendrez ?
2/Vous montez dans un autocar mais vous ne savez pas où il va vous conduire ni par quel chemin il va passer. Serez-vous rassuré s’il y a des embûches sur la route ?
A travers ces deux exemples, je souhaitais vous faire prendre conscience de l’importance de créer une vision globale du suivi non seulement pour vous, diététicien·ne, mais aussi pour vos patient·e·s.
Alors concrètement comment créer cette vision ?
Grâce à un planning de consultation : Dès le premier rendez-vous, remettez à chaque patient·e un planning (idéalement de 3-4 mois) avec un nombre précis de consultations afin de viser un premier objectif. En général, je démarre avec un planning qui comporte 5-6 rendez-vous. Ensuite, pour chaque rendez-vous, intégrez une activité thématique et choisissez des thèmes en fonction des difficultés du patient observé lors du premier rendez-vous et aussi en fonction de ses souhaits si cela a été exprimé.
Le planning, combiné à la systématisation des activités thématiques, créeront une vision chez vos patient·e·s pour qu’ils sachent où vous allez avec lui. Si vous validez cela ensemble cela diminuera le risque de « mauvaises surprises” (arrêt prématuré du suivis, lapin en consultation, etc.)
Durant les suivis, il n’est pas rare d’avoir qu’il y ait des “passages à vide”, où le patient n’a plus d’énergie à suivre les conseils et où il risque de baisser les bras et d’arrêter son suivi.
Dans ces cas-là, nous nous devons d’aider le·la patient·e à remonter la pente et il vaut mieux avoir dans son “arsenal” quelque chose de plus fort qu’un simple “Allez, on s’accroche, ça va aller”. Et si on ne réussit pas à remonter le moral de notre patient·e et que la démotivation perdure, il y a de fortes chances que le·la patient·e abandonne et rompt tout lien de communication.
C’est la raison pour laquelle j’invite systématiquement tou·te·s mes patient·e·s à chercher leurs motivations profondes dès leur premier rendez-vous. Ce début de suivi est particulièrement propice à cet exercice car en général son moral est au beau fixe.
Ce que j’entends par “motivations profondes “ c’est que mon patient comprenne et visualise le “pourquoi”. Pourquoi doit-il venir toutes les 3-4 semaines en consultation ? Pourquoi doit-il suivre mes conseils ? Pourquoi ne doit-il plus manger la même chose qu’avant ?
Par exemple, je lui demande :
OU un autre exemple :
Alors, imaginez maintenant votre patient en plein découragement face à ces changements alimentaires. Vous pourrez alors l’inviter à relire son dossier diététique où il aura noté toutes ses motivations profondes…
L’alimentation fait partie du quotidien, et ce au moins 3 fois par jour. Sur 3 semaines cela fait 21 jours où le patient se retrouve seul avec ses problèmes alors qu’il n’a pu discuter avec son diététicien que pendant 1h.
Imaginez tous les problèmes potentiels que votre patient peut rencontrer entre chaque rendez-vous.
Il y a un adage que j’adore et je souhaitais vous partager :
“Les petits problèmes peuvent être difficiles à trouver mais ils sont très faciles à résoudre. Par contre les gros soucis sont évidents mais ils sont très difficiles à résoudre.”
Mieux vaut donc traiter plus souvent mais plus tôt des petits problèmes avant qu’ils ne s’enveniment ! Voici un exemple tiré de ma pratique :
Alors que je prenais de ses nouvelles entre deux rendez-vous, une patiente me dit :
Durant ce petit coup de fil de 10 minutes au téléphone, nous avons pu discuter de sa situation et retrouver de l’énergie pour continuer.
Mieux vaut donc gérer plus régulièrement des petits problèmes avant qu’ils ne s’amplifient, deviennent de gros problèmes, qui seront insurmontables et amèneront au décrochage.
Si ce genre de petit contact n’ont pas lieu, le risque est alors élevé de ne plus revoir ce genre de patients au rendez-vous suivant.
Pour les patients souffrants d’allergies ou d’intolérances alimentaires, le fait de les suivre entre les rendez-vous va aussi rendre vos conseils beaucoup plus réactifs et pertinents.
Le fait de proposer un tel contact (peu importe l’outil utilisé), apporte vraiment une plus-value aux consultations en augmentant la réussite des prises en charge de manière significative.
Votre “mindset”, c’est votre “carte mentale” qui va déterminer non seulement vos actions mais aussi la manière dont vous analysez et réagissez à ce qui va se passer durant les consultations. Et en tant que diet-preneur, c’est important d’avoir le bon mindset pour réussir et se sentir épanoui·e dans son métier.
En effet, en diététique, très souvent la qualité de nos prises en charge va être évaluée à travers les résultats de nos patient·e·s.
C’est comme cela que le “monde extérieur” va nous évaluer, c’est normal, et c’est comme ça que le bouche à oreille fonctionne.…
Mais par contre, lorsqu’il s’agit de s’auto-évaluer, le piège serait d’apporter trop d’importance aux résultats de nos patient·e·s avec le risque de douter de notre légitimité à chaque fois que nous avons un patient en “situation d’échec“, c’est-à-dire qui n’a pas ou peu de résultats.
Dans ces cas-là, les bonnes questions à se poser ne sont pas
“Qu’est-ce que je peux bien faire de plus avec celui-là ?”
“Qu’est-ce que j’ai pu bien faire de travers avec ce patient ?”
“Bon il faut absolument resserrer la vis avec celui-là … »
Mais plutôt
“Ok, je ne me laisse pas entraîner dans la déception qui émane de ce patient, je ne me voile pas la face et je prends mon courage à deux mains pour investiguer et poser les questions “difficiles” pour découvrir la cause de cette situation.”
“Ok c’est normal de passer par étape “difficile”, ça fait partie du « chemin », l’important c’est de pouvoir rebondir »
“C’est mon rôle de faire comprendre à mon patient la cause de ses échecs et de faire mon max pour lui montrer le chemin, MAIS en aucun cas, je ne pourrais faire ce chemin à sa place«
La nuance est subtile, certes, mais on ne peut plus importante !
Les résultats de vos patient·e·s sont la conséquence de notre système de prise en charge. Mettre votre focus et votre énergie sur les résultats de vos patient·e·s ne mène nulle part !
Par contre, mettre votre énergie et votre focus pour se construire un système de prise en charge unique qui maximisera les chances de succès de votre patientèle cible vous emmènera, avec un peu de travail, vers le succès et l’épanouissement.
Lorsque j’ai intégré ces 5 principes dans mon système de prise en charge, c’est toute ma perception globale de la consultation qui a changé.
Au début de ma carrière, je n’étais pas très fière des résultats obtenus par mes patient·e·s, je le prenais vraiment personnellement et je me disais :
Toutes ces pensées avaient un impact négatif sur mon moral et diminuaient mon énergie à réaliser mes consultations et finalement, cela m’entraîne dans un cercle vicieux.
Grâce aux contacts avec les autres diététiciens du GDI et à l’UPDLF, j’ai pu me ressaisir et améliorer considérablement mes prises en charge.
Depuis, j’ai même créé le centre de formation Diet’ en transition pour transmettre mes méthodes et mon savoir-faire à un maximum de diététicien·ne·s.
Si vous aussi vous souhaitez vous construire une carrière de diététicien·ne indépendant·e stable et pérenne, j’ai créé une formation gratuite :