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COVID-19

"Les aînés et leurs soignants ont payé un très (trop) lourd tribut"

Les témoignages

La crise que nous traversons tous a touché de plein fouet nos aînés, leurs familles, mais aussi l’ensemble du personnel qui les accompagne au quotidien. Confinées, coupées de l’extérieur, l’ensemble des maisons de repos ont vécu des mois très difficiles depuis le début de la crise sanitaire en mars 2020.


L’isolement pour les uns, la peur du virus pour les autres, la souffrance d’être séparé de ceux qu’on aime, etc. ont eu un effet négatif sur l’état général des aînés.

Article co-écrit par Hélène Lejeune et Hélène Leroy, diététiciennes agréées

1. Maison de repos et de soins

a) « La Sérénité » à Jemeppe sur Sambre

Certaines souffrances et constats négatifs sont toujours actuels au sein de la résidence « la Sérénité » comme :

b) MR-MRS (Sud de la Belgique)

La diététicienne de cette MR-MRS a suivi l’évolution des poids entre février et mai 2020 et constate que les résidents n’ont pas été pesés au plus haut pic de la pandémie, ce qui l’interpelle fortement. Le poids chez une petite minorité des résidents a pu être stabilisé. On constate chez tous les autres une perte de poids faible à importante. Près d’un quart de leurs résidents sont décédés sur cette période, heureusement pas tous de la COVID-19.

2. Au sein du centre hospitalier Valida

a) Témoignage de l'équipe diététique

L’équipe se compose de cinq diététicien·ne·s ayant tous une spécialisation. Parmi eux, c’est Stéphanie Lambotte, diététicienne agréée et spécialisée en gériatrie et psychogériatrie, qui se chargera des soins nutritionnels apportés aux patients atteints du SARS-CoV-2. Elle témoigne à présent de son expérience au sein d’une unité COVID-19.

« Frustration » est le premier mot que Stéphanie nous expose. Au début de la pandémie, elle n’était pas autorisée à voir les patients infectés à la COVID-19 étant donné qu’il était impératif de limiter le nombre d’interactions avec les patients. Il était primordial pour elle et l’équipe de suivre ces patients affaiblis par le virus. Malgré ce sentiment d’impuissance, il a été décidé de réaliser les prises en soins diététiques par téléphone avec les patients. Les échanges étaient parfois difficiles au vu de la grande fatigabilité du patient et des difficultés respiratoires.

D’un commun accord avec l’ensemble du service diététique, il a été décidé d’inclure un régime hyperprotéiné et hypercalorique chez tous les patients ayant contracté le virus. Les repas étaient servis avec de la vaisselle à usage unique afin de limiter la propagation du virus.

C’est seulement à partir de la seconde vague, que la diététicienne a pu être au chevet du patient et intégrer l’équipe médicale et paramédicale au sein de « l’unité COVID-19 ». Elle rejoindra une équipe motivée, déterminée même si la peur était bien présente, au vu du chaos chez nos ainés.

3. Divers services du Centre Hospitalier Régional (CHR) de Namur

a) État des lieux au sein du CHR de Namur :

A partir du 24 mars 2020, quotidiennement la cellule de crise de la COVID-19, commune au CHR site Meuse et site Sambre communique au personnel via intranet le suivi des indicateurs (patients hospitalisés COVID-19 positifs, lits disponibles en soins intensifs, lits disponibles en salle, etc.). En gériatrie, 76 cas positifs hospitalisés dont 32 décès ont été recensés.

b) Témoignage du Docteur Ostoja, gériatre

Le Docteur Ostoja atteste qu’en général les ainés arrivent plus dégradés et plus dénutris. En subaigu, ils sont admis à l’hôpital deux à quatre semaines plus tard qu’avant la pandémie de la COVID-19, présentent des pathologies plus problématiques ce qui peut allonger la durée d’hospitalisation, et peut réduire les chances de réversibilité du déclin. Ceci majore et précipite le risque de placement et entrainera probablement une mortalité plus importante.

Les familles deviennent de plus en plus exigeantes vu la limite de visites autorisées, et du nombre d’interactions avec les patients ; les contacts s’opèrent essentiellement par téléphone.

Le manque de personnel se fait aussi ressentir tout comme sa démotivation, ce qui impacte considérablement la qualité de la prise en soins.

c) Témoignage de l'équipe diététique

Depuis le début de la crise de la COVID-19, les pratiques ne cessent d’évoluer. De nouvelles mesures doivent être prises presque chaque jour au sein de l’hôpital qui donnent lieu à des nouvelles procédures à mettre en place dans l’urgence afin d’apporter aux patients les soins qu’ils requièrent tout en garantissant la sécurité de tous les collaborateurs. Toutes ces notes et procédures internes, envoyées par e-mail doivent être lues et appliquées par tous les prestataires en service.

Avant leur mise en œuvre, les diététicien·ne·s se sentaient livré·e·s à eux/elles-mêmes, ne sachant pas toujours quelle attitude adopter pour assurer leur sécurité, celle du patient et celle de leurs collègues. Les horaires ont été adaptés pour permettre une répartition des membres de l’équipe diététique en 3 groupes (sans contact entre eux) et la mise au télétravail en alternance.

Pour l’ensemble de l’équipe diététique, il était primordial de continuer à garder un maximum de contacts avec les patients. La prise en soins minimale s’opérait par téléphone ou par courrier étant donné l’interdiction, au début de la pandémie, de visites au chevet du patient.

D’un commun accord il a été décidé de mettre en place un régime hyperprotéiné et hypercalorique pour chaque patient hospitalisé, pour COVID-19, ou suspicion de COVID-19. Les repas étaient servis dans de la vaisselle à usage unique de manière à ce que rien ne sorte de la chambre et pour éviter tout risque de contamination.

L’hôpital de jour gériatrique a été fermé à partir du 16 mars 2020. Les liaisons gériatriques ont été mises à l’arrêt afin de rendre le personnel qui y est affecté disponible pour les étages. Un des deux étages de gériatrie du CHR de Namur a été réservé aux patients âgés détectés positifs à la COVID-19. C’est dès la mi-mai 2020 que les diététicien·ne·s ont été à nouveau autorisé·e·s à se rendre dans les services.

4. Echanges et témoignages des membres du GDG

Au début de la pandémie, en MR-MRS, les patients sont refoulés de l’hôpital vers la MR-MRS. Nous sommes autant horrifié·e·s que dépité·e·s. Or, en maisons de repos on ne disposait pas des matériels adéquats (équipement de protection, morphine, oxyconcentrateurs, etc.). Les conditions de prise en soins des résidents étaient déplorables. La pénurie de personnel s’est très vite fait sentir (beaucoup d’entre nous sont contaminé·e·s, d’autres craignent de l’être) ; les diététicien·ne·s font alors de leur mieux pour combler les absences. Les projets axés sur la prise en soin nutritionnelle sont mis en stand-by afin de faire tourner la cuisine et assurer les tâches logistiques. Les soignants et membres du personnel paramédical en poste se sentent démuni·e·s, dépassé·e·s, seul·e·s face au manque de moyens. Ils/Elles assistent, impuissant·e·s, en permanence à des situations surréalistes au sein de leur institution ; ils/elles n’ont plus la possibilité d’accompagner les résidents qu’ils/elles soignent pour certain·e·s depuis des années, même dans leurs derniers moments, ni de soutenir leurs proches ; ils/elles n’ont même pas le droit d’effectuer la toilette mortuaire des résidents décédés qu’ils/elles ont pour consigne de déposer dans des sacs mortuaires sur le parking de leur institution où viennent les embarquer les pompes funèbres. Adieu les projets centrés sur les lieux de vie réservés aux personnes désorientées, adieu les méthodes MONTESSORI à laquelle de nombreux acteurs ont été formés l’année précédente et consort. Obligation de quarantaine (isolement des résidents à leur admission ou en cas de suspicion de contamination), absence de référent « hygiène » au sein des institutions alors qu’il y a des référents dans un tas de domaines (démence, incontinence, nutrition, plaies, incontinence, etc.), déclin précipité par manque d’assistance des personnes âgées présentant des troubles cognitifs, arrêt des pesées mensuelles par peur de contamination, tout cela a conduit à une perte totale de repères pour tous, acteurs du soin et résidents et à une dégradation globale des aînés institutionnalisés.

GDG

Il importe de signaler que l’AViQ (Agence pour une Vie de Qualité) a, de son côté, dès que possible apporté un soutien organisationnel et psychologique aux institutions confrontées à de nouveaux cas de COVID-19 ou désœuvrées face aux difficultés rencontrées par le personnel en place. Elle a mis sur pied une campagne (www.trouverdusoutien.be) et divers outils destinés aux particuliers et professionnels.

5. Quelques témoignages de médecins coordinateurs à Bruxelles

Les médecins pointent un manque crucial de matériels de protection pour le personnel soignant. Sans ceux-ci les médecins devaient fortement limiter leurs soins et visites au chevet des patients ainés atteints de la COVID-19. Finalement, leurs présences et visites se limitaient aux urgences, au soutien et conseil de leurs équipes. L’un deux nous confie : « j’avais l’impression de ne pas pouvoir faire mon devoir et travail de médecin comme je dois le faire ! ».

Les médecins disent avoir vécu une terrible situation, une situation de « guerre » ! Certains de leurs patients ainés le témoignaient également. Le plus difficile et ce qui leurs a demandé beaucoup de courage c’est une « impression ou un ressenti d’abandon involontaire » des ainés, suite à ce manque important de matériels de protection et de directives claires dès le départ.

Quelles prises en soins nutritionnelles pour les patients âgés atteints de COVID-19 ?

Au sein de l’UPDLF et plus spécifiquement au sein du groupement de diététiciens de gériatrie (GDG), des recommandations de prise en soin nutritionnelle des patients âgés atteints de COVID-19 ont été émises :

La SFNCM a également édité des fiches :

Bibliographie

1/ Van Beckhoven, D., Duysburgh, E., Montourcy, M., De Rouck, M., Vilain, A., Catteau, L., Deblonde, J., Wyndham-Thomas, C., Van Goethem, N. Points clés de la surveillance des patients hospitalisés atteints d’une infection COVID-19 confirmée: Résultats jusqu’au 14 juin 2020. Bruxelles, Belgique: Sciensano; 2020. Numéro de dépôt légal : D/2020/14.440/65. Retrieved at 28/09/2021 from https://covid-19.sciensano.be/sites/default/files/Covid19/COVID-19_BRIEF_HOSPITAL_REPORT_FR.pdf

 

2/Sciensano. Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 26 juin 2020. Retrieved at 28/09/2021 from https://covid-19.sciensano.be/sites/default/files/Covid19/COVID-19_Weekly%20report_20200626%20-%20FR_0.pdf

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