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Vive l'hiver !

Le Plantain Lancéolé, une belle ressource sous le manteau neigeux de l’hiver

Le « Roi des chemins » sur lequel nous marchons si fréquemment sans y porter la moindre attention, est pourtant depuis toujours une bénédiction pour l’humanité. Son usage thérapeutique remonte au moins à la Grèce antique. Découvrons qui se cache derrière cette plante d’apparence si banale.

Pauline de Voghel, diététicienne agréée. www.paulinedevoghel.be, info@paulinedevoghel.be

Dans le monde, il existe 200 espèces de plantain, dont cinq en Belgique. Les plus courants forment une tribu de trois frères : le « petit gros », le Plantago media ; le « grand mince », le Plantago lanceolata dont nous parlons ici ; et le Plantago major, dit le « grand costaud ». Ces 2 derniers peuvent être confondus sous un seul nom dans la pratique, tant par leur composition nutritionnelle que par leurs vertus médicinales très similaires.

Caractéristiques botaniques

Notre Plantago lanceolata, appelé aussi « oreille de lièvre » ou « herbes à cinq coutures » (faisant référence à ses cinq nervures filandreuses caractéristiques, presque parallèles et très saillantes sur la face inférieure des feuilles) est une plante vivace de 10 à 60 cm se dressant en touffes de rosettes denses et dressées à la base. Elles repoussent rapidement après avoir été coupées, ce qui facilite amplement la cueillette. La plante ne présente pas de tige, seulement une hampe florale au sommet de laquelle sont réunies une multitude de petites fleurs en épi. Les feuilles épaisses et allongées en forme de fer de lance sont entières, au sommet pointu, et se rétrécissent graduellement à la base.

Le Plantago Major, aussi appelé le Plantain des oiseaux tant ses graines les régalent, est la « plante pied » car il indique – et donc préfère – un sol plus compacté que les autres espèces de plantain. Il se distingue du lancéolé en formant des rosettes davantage étalées au sol. Son inflorescence en épi est beaucoup plus allongée et peut atteindre voire dépasser la taille de la hampe qui la porte. Ses feuilles largement ovales et obtuses, pouvant atteindre 30 cm de hauteur, de texture épaisse, sont légèrement pourvues de poils très courts. Le pétiole, la tige de la feuille, est ferme, large et presque plus long que la feuille elle-même.

Biotope

Le plantain, largement distribué à travers le monde entier, préfère des milieux ouverts de type friches, prairies, champs et bords de chemin, lisières de bois ou de forêt, jardins, décombres ou fossés et terre inculte humide.  

Intérêts nutritionnels pour 100 g de Plantain lancéolé (1, 3)

Tableau 1 : Valeurs nutritionnelles moyennes pour 100g de Plantain lancéolé (1, 3)

En cuisine

Les feuilles et les inflorescences ont un délicieux et remarquable goût partagé entre le champignon frais et l’épinard. Sa légère amertume (surtout à maturité) lui confère beaucoup de caractère.

Les trois principales espèces de plantain (P. lanceolata, major et media) constituent de très bons légumes.

Préférons les jeunes feuilles (ou les repousses au cœur de la rosette) qui sont assez tendres pour être servies crues en salade ou en jus de légumes. Elles offrent de nombreuses possibilités et se marient très bien avec du fromage frais, hachées finement, etc. Lactofermentées, les feuilles de tous les plantains font une excellente choucroute.

Les feuilles plus âgées sont de consistance un peu moins agréable, plus coriaces et au goût un peu plus amer. Elles restent très bonnes une fois cuites, en soupe roborative ou en légumes à la façon des épinards, suées à la poêle dans l’huile d’olive et de l’ail ou intégrées dans des préparations de type omelette, quiche, galette, etc.

Les jeunes inflorescences du plantain lancéolé (épis noirs avant ouverture des fleurs) se consomment crues en salade ou de toutes les manières utilisées pour les jeunes feuilles. Saisies à la poêle, elles donnent l’impression d’un concassé de champignons. Elles rentrent bien dans la préparation d’une omelette, d’une galette ou d’une quiche. Ou simplement grillées et hachées en condiment. Cuites en beignets ou utilisées comme les câpres, blanchies au vinaigre.

Idées de recettes

Toast aux champi-plantain : 2 poignées d’épis noirs légèrement concassés, poêlés dans l’huile d’olive avec des échalotes, du poivre, du sel, du thym et du citron et une crème végétale ou animale, à servir sur des toasts.

Épis en sauce : Épis noirs sautés à sec ou à l’huile d’olive consommés en salade avec des feuilles de plantain fraiches hachées, du parmesan et des amandes effilées, le tout assaisonné avec de l’ail, de l’huile d’olive et du vinaigre.

Pesto de derrière les fagots : 50 g de jeunes feuilles de plantain lancéolé hachées (éventuellement blanchies) puis réduites en purée dans un mortier avec 3 c. à s. (cuillère à soupe) d’huile d’olive, 1 pincée de sel marin. Mélanger avec 20 g de noix hachées, 20 g de pecorino écrasé et du poivre noir.   

Fromage blanc au plantain et aux herbes : Mélanger ensemble 150 g de fromage blanc entier, 4 c. à s. de feuilles de plantain hachées très finement, 1 c. à s. de ciboulette émincée, 1 c. à s. d’origan, 1 c. à s. de lierre terrestre, 1 c. à c. (cuillère à café) de zeste d’orange, 2 c. à s. huile d’olive. 

Tarte plantain-ortie : Abaisser 250 g de pâte brisée et en foncer un moule à tarte. La précuire 5 minutes puis y déposer 50 g de noisettes moulues puis 200 g de plantain et 200 g d’orties, blanchis, égouttés et puis hachés. Ensuite 50 g de raisins secs coupés grossièrement, à recouvrir d’un appareil réalisé à l’aide de 2 œufs battus avec 250 ml de jus végétal ou de lait et 2 c. à s. de miel. Cuire la tarte 25 minutes à 180°C.

Salade de lentilles beluga aux herbes : Cuire 200 g de lentilles beluga et 3 feuilles de laurier dans un grand volume d’eau froide. Porter à ébullition et laisser cuire environ 20 minutes. Égoutter, rincer à l’eau froide pour stopper la cuisson. Les mélanger dans un saladier avec quelques herbes très finement émincées : 6 c. à s. de plantain, 2 c. à s. d’aillet, 2 c. à s. de persil, 3 c. à s. d’oseille, 1 c. à s. de feuilles d’estragon et 3 c. à s. de basilic. Ajouter en remuant délicatement la vinaigrette réalisée à partir de 4 c. à s. d’huile de cameline, 1 c. à s. de vinaigre balsamique, 1 c. à s. de moutarde à l’ancienne, 1 c. à s. de tamari, 1 c. à c. de zeste de citron.

Salade folle des prairies : Laver 4 bouquets de chacune de ces plantes : plantain, stellaire, laiteron, lamier tacheté ou des salades et autres légumes à feuilles du commerce. Confectionner 4 bouquets du mélange et les lier avec des brins de ciboulette blanchies. Les arroser d’une vinaigrette : 1 c. à s. d’huile de noisette et 3 de noix, 1 c. à s. de vinaigre balsamique, 1 c. à m. (cuillère à moka) de pâte de bouillon miso, le zeste d’une demi orange et son jus.  

Beignets de hampes de plantain : Mélanger intimement 125 g de farine avec 60 ml de bière et 1 pincée de sel. Laisser reposer 15 minutes au réfrigérateur après avoir ajouté 15 g de beurre fondu. Incorporer ensuite 2 blancs d’œufs battus en neige. Tremper dans cette pâte à beignet, une trentaine de hampe florale de plantain lancéolé. Les saisir 1 minute de chaque côté dans de l’huile pour friture, dans une poêle à rebord. Les égoutter dans un papier absorbant avant de les servir.

Principaux constituants médicinaux (1, 7, 10, 11)

Aussi réputée que répandue depuis les temps les plus anciens, Dioscoride, ce célèbre médecin grec en parle déjà au 1er siècle avant J.-C. La phytothérapie actuelle a rendu justice à cette plante que le XIXe siècle avait méprisée malgré son passé glorieux. Les paysans, eux, n’ont jamais cessé de leur faire confiance : le plantain reste l’une des quelques plantes sauvages les plus connues des campagnes.

Les plantains lancéolé et majeur contiennent :

Principales vertus (1, 7, 10, 11)

Le plantain est aussi surnommé « l’herbe aux charpentiers », « le fil d’or » qui recoud littéralement les plaies. Il les assainit et les cicatrise, qu’elles soient fraîches ou enflammées, récentes ou anciennes. Voici une très belle plante vulnéraire encore appréciée dans les milieux paysans actuellement, grâce à l’ensemble de ces propriétés :

Pour ce faire, il suffit d’appliquer directement sur la plaie des feuilles nettoyées et suffisamment froissées pour en extraire le suc.

Le plantain est également un bon anti-histaminique qui calme littéralement les piqûres d’insectes et d’orties, et un anti-allergique contre le rhume des foins, par exemple.

Il soigne aussi les affections des intestins grâce à la couche de mucilages qui les recouvre (ingérer les graines après plusieurs heures de trempage dans l’eau afin de ramollir le tégument (enveloppe du grain) et pour permettre aux mucilages qu’il contient de se transformer en gel émollient).

Les graines des plantains peuvent servir de laxatif mécanique, comme celles du psyllium, un plantain de Méditerranée. Astringent et adoucissant, utile dans la diarrhée et la dysenterie : il régularise les selles tout en calmant l’irritation du tube digestif.

C’est également un bon dépuratif, diurétique et tonique amer.

Enfin, il est reconnu comme astringent, anti-inflammatoire et expectorant pour les affections des voies respiratoires supérieures : maux de gorge, irritations oro-pharyngées, laryngites, etc. Il calme la toux sèche par son effet antispasmodique sur les muscles lisses des bronches et il facilite l’expectoration tout en agissant comme un reconstituant général.

Contre-indications

Il n’y a aucune contre-indication à ce jour, malgré quelques rares cas isolés d’irritation cutanée qui ont été rapportés. Des effets emménagogues observés in vitro font que l’usage de cette plante n’est pas recommandé pendant la grossesse.

Conclusion

Apprenez à reconnaître le plantain, ce grand roi des chemins, et vous le verrez partout ! Même en hiver, là où la nature nourricière est censée se faire un peu plus discrète. Il n’attend qu’à être apprivoisé par l’homme auquel il rend d’innombrables services.

Bibliographie

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(2) Couplan, F., Styner, E. (2009). Guide des plantes sauvages comestibles et toxiques. Delachaux et Niestlé.

(3) Couplan, F. (2011). Guide nutritionnel des plantes sauvages et cultivées. Les guides du naturaliste. Delachaux et Niestlé.

(4) Couplan, F. (2020). Guide de la survie douce. Vivre en pleine nature. Sang de la Terre.

(5) Moustie., Ducerf, G. (2013). Récolter les jeunes pousses des plantes sauvages comestibles. Terran.

(6) Couplan, F. (2012). La cuisine est dans le pré. Soliflor.

(7) Lieutaghi, P. (1996). Le livre des bonnes herbes. Actes sud.

(8) Couplan, F (2010). Cuisine sauvage, accommoder mille plantes oubliées. Sang de la terre.

(9) Bissegger, M. (2012). La cuisine des plantes sauvages. Ulmer.

(10) Treben, M. (2007). La santé à la pharmacie du Bon Dieu. Conseils d’utilisation des plantes médicinales. Ennsthaler.

(11) Ameenah, G.-F. (2014). Toutes les plantes qui soignent. Michel Lafon

(12) Veyrat, M., Couplan, F. (1997). Herbier Gourmand. Hachette pratique.

(13) Duke J. (2002). Handbook of Medicinal Herbs (2nd Edition). Washington : CRC Press.

 

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