Chez les parents, l’alimentation des enfants en bas âge suscite beaucoup d’interrogations. Le choix du lait adéquat en fait généralement partie.
Jusqu’à 18 mois, la base de l’alimentation reste (à défaut du lait maternel) le lait de premier âge puis, logiquement, le lait de deuxième âge (appelé également lait de suite). Se pose alors la question du choix du lait à privilégier à posteriori.
En tant que diététien∙ne∙s, comment pouvons-nous guider les parents dans le choix du lait afin de maximiser les chances que l’enfant en bas âge reçoive les apports adéquats pour une croissance optimale ?
Célia Deleersnijder, diététicienne agréée, diététicienne clinique au Centre Hospitalier Chrétien (CHC) Liège et diététicienne indépendante.
Tout l’enjeu d’un choix de lait adéquat réside dans l’importance de l’alimentation chez l’enfant en bas âge (de 1 à 3 ans). En effet, l’équilibre alimentaire chez l’enfant de cette tranche d’âge comporte plusieurs enjeux à court et long termes pour sa croissance et sa santé.
D’abord, durant cette période, la croissance est rapide : l’enfant grandit d’environ 10 cm par année (1). Or, nous savons que les mécanismes de croissance osseuse dépendent notamment du métabolisme phosphocalcique et donc d’un apport adéquat en calcium et vitamine D (1).
Ensuite, la petite enfance est également un moment charnière pour le développement cognitif. En effet, c’est durant cette période que la croissance cérébrale est la plus rapide et donc rend l’enfant très sensible aux problèmes de malnutrition (2). Au niveau des micronutriments, la carence en fer est fréquente chez les enfants de moins de 2 ans (42% des enfants en souffrent selon l’OMS (3)) et provoque des conséquences néfastes et irréversibles sur leurs capacités intellectuelles (4). L’apport en acides gras poly-insaturés (AGPI) et en particulier en oméga-3 a également un impact sur les aptitudes cognitives de l’enfant via son rôle dans la neurotransmission (5) (6). Pourtant, il est reconnu que l’alimentation occidentale est souvent déséquilibrée au niveau des AGPI fournis avec un apport excessif en oméga-6 par rapport aux oméga-3 (7).
Enfin, il est important de reconnaître que la petite enfance fait partie des périodes critiques pour le développement de surpoids voire d’obésité à l’âge adulte, accompagnée de toutes ses complications métaboliques associées (8). Cette tranche d’âge est donc un moment décisif en termes de prévention de l’obésité. Ainsi, nous savons qu’un apport en protéines trop élevé ainsi qu’un apport insuffisant en lipides en début de vie sont corrélés à un risque plus important de surpoids à l’âge adulte (9) (10).
En résumé, pour une croissance optimale il faudra veiller en priorité à un apport adéquat en protéines, lipides de qualité (dont oméga-3), fer, calcium et vitamine D.
En théorie, le respect des recommandations alimentaires belges permet de couvrir les besoins en macro et micronutriments (sauf vitamine D) de l’enfant sans risque de carence ni d’excès. Cependant, des études de consommations alimentaires menées chez les enfants en bas âge constatent qu’en pratique ce n’est pas le cas (11) (12). En effet, la consommation de protéines atteint jusqu’à 2 à 3 fois les consommations maximum recommandées. En ce qui concerne la vitamine D, les données de 2012 montrent que la consommation de vitamine D atteint à peine 50% des apports journaliers recommandés (AJR) (11). Quant aux oméga-3, c’est le même constat : les apports couvrent environs 40% des AJR pour la tranche d’âge (11). Au niveau du fer, l’apport est proche du minimum recommandé (11). L’apport en calcium est généralement couvert par les produits laitiers (11). Ces données confirment donc que l’alimentation belge des enfants de 1 à 3 ans peine à couvrir les besoins de cette tranche d’âge. Ces observations sont inquiétantes quant au développement optimal de l’enfant mais aussi quant aux risques de surpoids et d’obésité à l’âge adulte. D’ailleurs, dans le cadre d’un travail de fin d’études, j’ai eu l’occasion d’analyser les apports alimentaires d’une trentaine d’enfants en crèche et d’en venir aux mêmes conclusions.
Conscients de ces enjeux et problématiques, il est donc intéressant de se pencher sur l’intérêt du lait de croissance (LC) en complément de l’alimentation solide. Un consensus belge suggère que la consommation de LC chez ces enfants peut participer à l’atteinte des apports nutritionnels recommandés (13). En effet, la formule de ces laits de 3ème âge est en principe étudiée pour satisfaire les besoins des enfants de 1 à 3 ans (14). L’intérêt principal du LC est sa teneur réduite en protéines par rapport au lait de vache. Cela répond donc à la problématique liée à la surconsommation d’aliments protéiques chez l’enfant en bas âge. Aussi, les LC peuvent être enrichis en toutes sortes de minéraux (dont le fer et le calcium), vitamines (dont la vitamine D), pré/probiotiques et acides gras essentiels.
Contrairement aux préparations pour nourrissons et aux préparations de suite, les LC ne sont pas définis ni réglementés par la législation européenne sur les denrées alimentaires (15). Cela implique que la composition de ces laits varie en termes d’apport calorique et de composition nutritionnelle (14).
Or, depuis 20 ans, leur présence sur le marché européen ne fait qu’augmenter (14). Sur la région liégeoise, dans les magasins et pharmacies (hors internet), il y aurait plus de trente-cinq sortes de LC (recensés personnellement dans le cadre d’un travail de fin d’études en 2022). Les tableaux 1 et 2 résument la disparité des valeurs nutritionnelles des LC recensées lors de ce travail.
Les parents sont donc confrontés à un vaste choix de LC aux compositions amplement variables. Certains de ces laits contiennent même du saccharose et des arômes (de biscuit, de vanille, etc.) et sont par conséquent à bannir.
Face à ce constat, il est donc important de faire connaître les critères émis par l’Office de la Naissance et de l’Enfance (ONE) quant aux choix de ces laits, soit : « une teneur en protéines basses, un enrichissement en acides gras à longues chaînes et l’absence de saccharose et d’arômes » (16). Malheureusement, et étant donné le manque de législation sur la composition des LC, peu de laits répondent à ces critères.
C’est donc à nous, diététien∙ne∙s, que revient la responsabilité d’informer et d’orienter les parents vers un lait de croissance de qualité. Aussi, il serait intéressant d’informer les pédiatres et médecins généralistes car souvent le choix du LC se fait sur base de leurs conseils. Enfin, mettre en lumière la problématique du manque de législation et militer pour des compositions nutritionnelles réglementées serait un idéal à poursuivre.
Finalement, nous pouvons donc conclure qu’un lait de croissance bien choisi pourrait avoir sa place dans l’alimentation de l’enfant en bas âge étant donné leur teneur amoindrie en protéines et leur apport en vitamines et minéraux essentiels. Même si, il ne faut tout de même pas perdre de vue, qu’en tant que diététien∙ne∙s, notre vocation première est d’améliorer les habitudes alimentaires des familles afin d’aider les enfants à atteindre les apports nutritionnels recommandés. Seul, le lait choisi ne peut pallier tous les excès et carences. Le lait de croissance adapté est donc à conseiller en complément d’une alimentation équilibrée et variée.
Bibliographie
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2/Dhopeshwarkar, G.A. (1983). Effects of Malnutrition on Brain Development. Nutrition and Brain Development. Boston, MA: Springer US. 49–83.
3/Organisation Mondiale de la Santé. (2020). Des lignes directrices de l’OMS aident à détecter la carence en fer et à protéger le développement du cerveau. Retrieved from https://www.who.int/fr/news/item/20-04-2020-who-guidance-helps-detect-iron-deficiency-and-protect-brain-development
4/Scrimshaw, N.S. (1998). Malnutrition, brain development, learning and behavior. Nutrition Research : Vol. 18.
5/Heude, B., Forhan, A., Slama, R., Douhaud, L., Bedel, S., Saurel-Cubizolles, M.J., et al. (2016). Cohort Profile: The EDEN mother-child cohort on the prenatal and early postnatal determinants of child health and development. International Journal of Epidemiology, Apr 11;45(2). 353–363.
6/Fédération de la Recherche sur le Cerveau. (2018). L’alimentation. Retrieved from https://www.frcneurodon.org/comprendre-le-cerveau/a-la-decouverte-du-cerveau/lalimentation/
7/Simopoulos, A.P. (2002). The importance of the ratio of omega-6/omega-3 essential fatty acids. Nutrition and Heath, 56. 365–379.
8/Dietz, W.H. (1994). Critical periods in childhood for the development of obesity. The American Journal of Clinical Nutrition, May 1;59(5). 955–959. https://doi.org/10.1093/ajcn/59.5.955
9/Office de la Naissance et de l’Enfance. (2018). Enfant et nutrition : guide à l’usage des professionnels. Bruxelles, Belgique : Parmentier Benoît, editor. 65–78 p.
10/Rolland-Cachera, M.F. (2018). Perinatal consumption of dietary fat: Association with the risk of later obesity. OCL – Oilseeds and fats, Crops and Lipids. EDP Sciences.
11/Huysentruyt, K., Laire, D., van Avondt, T., de Schepper, J., Vandenplas, Y. (2016). Energy and macronutrient intakes and adherence to dietary guidelines of infants and toddlers in Belgium. European Journal of Nutrition, 55(4). 1595–1604.
12/Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. (2019). Avis de l’ANSES relatif à l’actualisation des repères alimentaires du PNNS pour les enfants de 0 à 3 ans. Retrieved from https://www.anses.fr/fr/content/avis-de-lanses-relatif-%C3%A0-lactualisation-des-rep%C3%A8res-alimentaires-du-pnns-jeunes-enfants-0-3
13/Vandenplas, Y. (2013). A consensus-statement on Growing-Up Milks for children 1-3 years old.
14/Hojsak, I., Bronsky, J., Campoy, C., Domellöf, M., Embleton, N., Mis, N.F., et al. (2018). Young child formula: A position paper by the ESPGHAN committee on nutrition. Journal of Pediatric Gastroenterology and Nutrition, Jan 1;66(1). 177–185.
15/European Commission. (2016). Report from the Commission to the European Parliament and the Council on young child formulae. Brussels.
16/Office de la Naissance et de l’Enfance. (2021). Repertoire des laits infantiles.
Travail de fin d’études (TFE) – Évaluation des connaissances de la population domiciliée en Belgique en termes d’aliments ultra-transformés et élaboration d’outils sur ceux-ci.
La production et la consommation d’aliments ultra-transformés ont augmentés parallèlement à l’accroissement mondial de la prévalence de l’obésité et des maladies chroniques. Vu les effets néfastes que ces aliments ont sur la santé et l’environnement, il a été question de s’intéresser aux connaissances qu’ont les individus domiciliés en Belgique en la matière et de les améliorer.
Fabio CREA, diététicien-nutritionniste agréé et employé à l’Hôpital Gériatrique Scheutbos (Silva-medical). https://fabio-crea.be
Le présent travail de fin d’études a été réalisé en étroite collaboration avec les promoteurs :
> Docteur Anthony Fardet (INRAE),
> Docteur Fabienne Depoortere (HELDB)
> et Arthur Delcourt (UPDLF, GDEA, Nutrition&Sport&Health).
Cet article aborde la partie pratique du TFE.
La partie théorique a été abordée dans l’article du 15/05/2023. Pour le relire, cliquez ci-dessous.
Dans le cadre ce travail de fin d’études en diététique à la Haute École Lucia de Brouckère de Bruxelles, il a été question de réaliser des outils permettant d’améliorer les connaissances de la population domiciliée en Belgique sur le thème des aliments ultra-transformés. Les outils qui ont été élaborés sont un site internet (fabio-crea.be), une brochure et un poster avec deux variantes.
La partie pratique de ce travail s’est déroulée en trois temps :
1)
Un premier questionnaire a été partagé dans le but d’évaluer les connaissances des participants en termes d’aliments ultra-transformés ;
2)
Après avoir répondu à ce questionnaire, les outils informatifs ont été fournis. Une période de maximum 10 jours a été accordée aux répondants pour les consulter ;
3)
Un second questionnaire de connaissance a été partagé. Les résultats obtenus ont été comparés à ceux de l’enquête préalable.
Un échantillon témoin a été pris parallèlement à l’étude afin de s’assurer que l’amélioration des connaissances de la population était bien due aux outils élaborés et non pas à d’autres facteurs extérieurs à l’étude.
Message de notre partenaire : FrieslandCampina
Après analyse statistique des résultats, il en découle que la population domiciliée en Belgique ne sait pas ce que sont les AUTs et les outils créés permettent bien d’améliorer ses connaissances sur ce sujet.
Bibliographie
Anastasiou K., Baker P., Hadjikakou M., Hendrie G.A., Lawrence M. A conceptual framework for understanding the environmental impacts of ultra-processed foods and implications for sustainable food systems. Consulté le 12/08/2022.
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Travail de fin d’études (TFE) – Évaluation des connaissances de la population domiciliée en Belgique en termes d’aliments ultra-transformés et élaboration d’outils sur ceux-ci.
La production et la consommation d’aliments ultra-transformés ont augmentés parallèlement à l’accroissement mondial de la prévalence de l’obésité et des maladies chroniques. Vu les effets néfastes que ces aliments ont sur la santé et l’environnement, il a été question de s’intéresser aux connaissances qu’ont les individus domiciliés en Belgique en la matière et de les améliorer.
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Le présent travail de fin d’études a été réalisé en étroite collaboration avec les promoteurs :
> Docteur Anthony Fardet (INRAE),
> Docteur Fabienne Depoortere (HELDB)
> et Arthur Delcourt (UPDLF, GDEA, Nutrition&Sport&Health).
Si la révolution industrielle et le développement économique semblaient annoncer une ère de progrès et de meilleure hygiène de vie, force est de constater, qu’aujourd’hui, les produits venant de l’industrie alimentaire sont loin d’être une source alimentaire saine, fiable, durable et éthique. En effet, sous l’impulsion de multiples facteurs, tels que la commercialisation et l’arrivée des hypermarchés, les aliments sont désormais victimes de mutations structurelles qui les éloignent davantage de leurs compositions et matrices originelles. Par ailleurs, certains procédés technologiques actuels donnent lieu à des aliments ultra-transformés (AUTs).
Les AUTs sont des préparations alimentaires industrielles fabriquées à partir de substances dérivées d’autres aliments, dont la structure a été modifiée. Il s’agit de produits transformés par de multiples processus physiques, biologiques ou chimiques qui sont constitués de peu ou pas d’ingrédients frais. Ils contiennent généralement des substances cosmétiques synthétisées en laboratoire et des additifs (exhausteurs de goût, colorants, arômes, édulcorants, stabilisants, etc.) permettant d’améliorer l’aspect, la couleur, le goût, la texture ou encore l’arôme du produit.
Au cours des dernières décennies, l’intensité des traitements technologiques des aliments a augmenté, passant de la simple cuisson à l’eau bouillante ou à la vapeur à la cuisson-extrusion à hautes pressions et températures. Au fil du temps, les industries ont commencé à fractionner les aliments et à utiliser ces fractions pour fabriquer de nouveaux produits lors de l’assemblage. En effet, l’industriel extrait les nutriments constitutifs de l’aliment par un processus appelé le « cracking » ou le « fractionnement alimentaire ». L’ultra-transformation alimentaire est donc aussi le résultat de la fragmentation d’un aliment brut, soit la destruction de sa matrice par des procédés industriels mécaniques, enzymatiques et/ou chimiques.
Le fractionnement (cracking) est un procédé industriel qui permet de fractionner un produit brut, entier. Les méthodes pour isoler les briques élémentaires de l’aliment consistent en l’extraction par des solvants, la purification, les hydrolyses chimiques et/ou enzymatiques souvent à hautes températures. Ces procédés d’ultra-transformation causent une dégradation extrême de la matrice d’un aliment.
L’effet qu’un aliment a sur la santé ne dépend pas uniquement de la quantité de nutriments qu’il contient. Il dépend également de la matrice de l’aliment. La matrice est la « structure » de l’aliment et l’ensemble des interactions entre ses constituants. Deux aliments ayant une quantité de calories et de nutriments identique, avec une matrice différente, n’ont donc pas les mêmes effets sur l’organisme. Les maladies chroniques sont d’abord associées à la dégradation et à l’artificialisation des matrices alimentaires plutôt qu’à la composition des aliments.
Les ingrédients caractéristiques des aliments ultra-transformés peuvent être divisés en substances alimentaires d’usage culinaire nul ou rare et en classes d’additifs dit « cosmétiques ». Les additifs présents dans les AUTs sont dit « cosmétiques » car leur fonction est de modifier l’apparence de l’aliment. En effet, les additifs cosmétiques ont pour but de masquer les effets indésirables créés par les ingrédients, les procédés et les emballages, d’exacerber les propriétés sensorielles, d’imiter les vrais aliments et de rendre le produit final attrayant à la vue, au goût, à l’odorat et au toucher.
Créée en 2009 par le chercheur brésilien Carlos Monteiro, NOVA, qui n’est pas un acronyme, est une classification empirico-inductive qui arrange tous les aliments et produits alimentaires en quatre grands groupes en fonction de l’étendue de la transformation industrielle qu’ils subissent. Elle prend également en compte les méthodes chimiques, biologiques et physiques ainsi que les additifs utilisés au cours du processus de fabrication des aliments. La classification NOVA a fait l’objet de discussions et de critiques car celle-ci est incomplète. En effet, NOVA ne se base pas sur des aspects physiques/chimiques distincts et sans équivoque des aliments. En d’autres termes, le quatrième groupe de NOVA des AUTs regroupe trop d’aliments hétérogènes, notamment en termes de composition. NOVA ne comprend pas une liste de tous les composés qui permettrait d’identifier un aliment comme étant ultra-transformé. De plus, l’ultra-transformation concerne la composition des aliments, mais également la matrice alimentaire dénaturée par des modifications industrielles.
Il est fondamental de ne pas faire l’amalgame entre les AUTs et les aliments uniquement transformés. Dans une certaine mesure, presque tous les aliments peuvent être « transformés », ne serait-ce que par conservation. Il n’est pas nécessaire d’évincer les aliments uniquement « transformés » étant donné que diverses méthodes de conservation inoffensives et certains processus, tels que la fermentation non-alcoolique, améliorent la qualité des aliments et sont bénéfiques pour la santé. De plus, l’évincement des aliments transformés du régime alimentaire induirait une diversité nettement moindre dans le choix des aliments et une consommation d’aliments moins sûrs pour la santé.
La classification Siga, qui découle directement de la classification NOVA, a été développée par Christodoulou Aris, pour informer les consommateurs, aider les institutions publiques et accompagner les industriels et distributeurs vers une offre en produits moins transformés sans stigmatiser certaines catégories d’aliments. Siga a été développée en combinant les quatre groupes holistiques NOVA avec quatre nouveaux sous-groupes réductionnistes, considérant le degré de transformation, l’impact de la transformation sur la matrice aliment/ingrédient, les teneurs en sel, sucre et graisse ajoutés, la nature et le nombre de marqueurs d’ultra-transformation (MUT) et les niveaux d’additifs à risque.
Contrairement aux croyances répandues, les AUTs ne se résument pas aux aliments associés à la malbouffe (par exemple : les sodas, les fast-foods, les pâtisseries industrielles, etc). En réalité, ils se trouvent aussi dans les rayons dits « végétariens », « sans gluten », « bio », « diététiques », « céréales petit-déjeuner », « produits alimentaires destinés à l’alimentation des nourrissons et jeunes enfants », etc.
Afin que l’acheteur puisse limiter sa consommation en AUTs, deux moyens pratiques existent pour les identifier :
Le Nutri-score est centré sur la composition en quelques nutriments et ne prend pas encore en compte le degré de transformation des aliments ni l’effet matrice. Des allégations nutritionnelles peuvent se trouver également sur les emballages de ces AUTs. Étant légiférées, ces allégations sont correctes, mais ont tendance à faire croire que l’entièreté de l’aliment est un plus pour la santé, ce qui n’est pas toujours le cas. Lorsque, sur un produit, une allégation nutritionnelle indique « source de… », « réduit en… », etc., cette allégation met l’accent sur un nutriment, c’est-à-dire sur une partie, souvent minime, de l’ensemble du produit.
L’intérêt des scientifiques pour le sujet des AUTs ne cesse de croître, car plusieurs caractéristiques de ces aliments, outre une qualité nutritionnelle moindre, sont supposées avoir des effets néfastes sur la santé. De ce fait, une multitude d’études de cohortes prospectives a démontré qu’un apport élevé en AUTs était associé à un risque plus élevé de surpoids et d’obésité, de maladies cardiovasculaires, de syndrome métabolique, d’hypertension artérielle, de diabète de type 2, de cancers, de syndrome inflammatoire de l’intestin, de déclin de la fonction rénale, de dépression et de mortalité précoce toutes causes confondues.
La diffusion d’AUTs sur la planète est associée à la dégradation de la santé, mais également à celle de l’environnement. En effet, les processus de production des ingrédients et des additifs contenus dans les AUTs sont associés à des systèmes alimentaires très intensifs et très polluants, donc non durables. L’impact environnemental croissant de ces aliments est également dû à la quantité d’emballages requis par ce système d’alimentation, où les portions sont souvent individuelles.
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Cet article a pour objectif de faire le point sur les dernières avancées scientifiques concernant les besoins en énergie et en macronutriments chez un patient atteint de cancer(s).
Joanne Vansimpsen, diététicienne agréée au Centre Hospitalier Régional de la Citadelle.
Un cancer est une pathologie complexe, caractérisée par une prolifération cellulaire anormale, rapide et non contrôlée par les mécanismes homéostatiques habituels [1]. Certains facteurs favorisent le développement de la maladie comme le mode de vie, l’alimentation, l’hérédité, des facteurs environnementaux etc. [2,3].
Le syndrome de cachexie cancéreuse est un problème qui apparait fréquemment chez les personnes atteintes de cette pathologie, aggrave leur état de santé et engage le pronostic vital. Ce syndrome, généralement irréversible, se caractérise par un état d’affaiblissement général, d’une inflammation généralisée, une perte de poids significative et une perte de masse musculaire avec ou sans perte de masse graisseuse [4,5].
Le cancer s’accompagne d’une reprogrammation des métabolismes glucidiques, lipidiques et protéiques pour répondre aux exigences énergétiques, de croissance et de survie de la tumeur. Ces altérations engendrent une dépendance des cellules cancéreuses envers certains nutriments, dont le glucose, les lipides et les acides aminés [6,7].
Le glucose est le substrat énergétique de choix des cellules cancéreuses [6,7]. Les cellules cancéreuses subissent l’effet Warburg, qui leur permet de produire de l’énergie à partir du glucose via la fermentation lactique. Alors que dans des cellules saines, les molécules de glucose entrent principalement dans le cycle de Krebs pour produire de l’énergie [6,7]. Bien que la quantité d’énergie libérée au cours de l’effet Warburg soit moins importante que via le cycle de Krebs, les tumeurs privilégient cette voie. En effet, le lactate sécrété acidifie le milieu extracellulaire et facilite le développement tumoral [6,7].
La littérature ne définit pas de quantité spécifique concernant l’apport glucidique chez un patient cancéreux. Le régime cétogène a été fortement impliqué et mis en avant ces dernières années. Cependant, les essais cliniques ont produit des résultats peu concluants. Une alimentation hyper- ou hypoglucidique n’est pas non plus préconisée [8].
L’apport glucidique recommandé suit les recommandations nutritionnelles belges : 50-55% du besoin énergétique journalier (BEJ) [8]. Quant à la qualité des glucides, la consommation de céréales complètes, plutôt que de céréales raffinées, est conseillée [8].
Le métabolisme des lipides est également altéré avec une synthèse accrue des acides gras. Ils sont non seulement une source d’énergie, comme les glucides, mais également nécessaires à la création des membranes des cellules cancéreuses et à la production des molécules de signalisation pro tumorale [7].
La voie de la lipolyse permet de dégrader les lipides en acides gras grâce à des lipases. Ils peuvent ensuite être utilisés afin de fournir de l’énergie [7].
Dernièrement, des recherches ont mis en évidence l’existence de la lipophagie. Il s’agit d’un type particulier d’autophagie. Dans ce processus, les gouttelettes lipidiques s’entourent d’une double membrane et sont décomposées par des enzymes lytiques, libérant les acides gras [9]. De l’énergie peut donc également être produite via ce mécanisme, qui permet le recyclage des composants métaboliques. Lorsqu’elles sont en situation de stress, les cellules cancéreuses tirent profit de ce processus pour survivre [9].
A nouveau, la littérature ne définit pas de quantité concernant l’apport en lipides. Des études suggèrent que les oméga-3, combinés avec des traitements anti-cancéreux, peuvent avoir un impact positif sur l’évolution du cancer*. Cependant, cette supplémentation s’accompagnait d’effets indésirables comme des saignements de nez, de selles molles, de nausées et d’éruptions cutanées [8].
*La combinaison d’une alimentation enrichie en oméga-3 et d’un traitement anti cancer augmente la sensibilité des cellules cancéreuses envers le traitement. Les oméga-3 accentuent le stress oxydatif et la peroxydation lipidique des cellules cancéreuses, ce qui empêche la propagation du cancer.
Dès lors, l’apport lipidique se base donc sur les recommandations nutritionnelles belges : 30-35% du BEJ [8]. Le choix des lipides suit également les recommandations du Conseil Supérieur de la Santé :
Les cellules cancéreuses ont besoin d’un apport plus important en acides aminés que les cellules saines afin de supporter leur croissance et leur prolifération rapide. En effet, le catabolisme des acides aminés produit des intermédiaires métaboliques qui servent de source d’énergie et de matières premières pour la synthèse de diverses molécules (acides nucléiques, protéines, lipides). Ils aident également à maintenir la balance rédox cellulaire et provoquent également la méthylation, qui réprime ou active l’expression des gènes, renforçant la croissance et l’agressivité de la tumeur [7, 10, 11].
Les acides aminés remplissent des rôles différents dans la cancérogénèse. Il est donc nécessaire de connaitre le rôle de chaque acide aminé dans la croissance et la prolifération tumorale, afin de déterminer s’il existe une alimentation adaptée, en termes de quantité et de qualité en acides aminés. Le rôle des acides aminés les plus cités et discutés dans la littérature :
Plusieurs acides aminés ont fait l’objet d’un certain nombre d’études avec des résultats prometteurs. La méthionine et la leucine (seule ou avec les BCAA) sont les plus étudiées lors de recherches se concentrant sur une modification du régime alimentaire :
Néanmoins, les recherches actuelles, bien qu’offrant des résultats encourageants, sont principalement à un stade pré-clinique et ne permettent pas de conclure sur les effets positifs d’un régime alimentaire modifié en acides aminés sur l’évolution du cancer et de la cachexie cancéreuse. De plus, la restriction en acides aminés apparait difficile car la littérature scientifique actuelle conseille une augmentation des apports en protéines afin de prévenir et de lutter contre la dénutrition et la cachexie cancéreuse [22].
Enfin, il est peu probable qu’une seule et même recommandation concernant la composition alimentaire en acide aminé soit préconisée à tous pour la prévention ou le traitement du cancer. En effet, différents types de cancers ont une source d’énergie préférée et des dépendances nutritionnelles propres vis-à-vis des acides aminés [13, 16].
L’apport protéique recommandé est celui de la Société Francophone de Nutrition Clinique et Métabolisme (SFNEP) : entre 1,2 à 1,5g de protéines/kg par jour, en fonction de l’état de santé du patient [27]. Au vu des études qui sont au stade pré-clinique ou ayant obtenus des résultats contrastés, il n’y a pas un profil d’acide aminé à privilégier ou à limiter.
Selon la SFNEP, les apports caloriques conseillés s’élèvent à 30-35 kcal/kg par jour [27]. Ces recommandations ont pour but de maintenir un état nutritionnel adéquat et réduire les risques de cachexie et de dénutrition qui augmentent les complications et la morbidité [27].
Les recommandations nutritionnelles sont celles d’une alimentation saine et équilibrée avec des apports adéquats en énergie et protéines. Il reste donc beaucoup de questions en suspens et des études supplémentaires sont indispensables. En effet, ces recherches pourraient présenter à l’avenir des résultats intéressants afin d’améliorer la prise en charge des patients, mais également les traitements pour le cancer.
Pour conclure, il n’existe pas un régime unique ou idéal pour le traitement du cancer. En effet, chaque cancer affecte le métabolisme à un degré diffèrent, ce qui explique pourquoi l’alimentation doit être adaptée aux besoins individuels. Les apports en glucides et en lipides suivent les recommandations nutritionnelles belges, se focalisant sur alimentation saine et équilibrée et favorisant le maintien d’un état de santé optimal. Les besoins énergétiques et protéiques sont eux basés sur les recommandations de la SFNEP et sont spécifiques à la pathologie du cancer afin de prévenir la dénutrition et la cachexie cancéreuse.
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Dans l’article qui suit vous trouverez un résumé des étapes menant à l’implémentation des textures IDDSI (International Dysphagia Diet Standardisation Initiative) au sein des Cliniques de l’Europe, ainsi que les collaborations étroites qui ont eu lieu entre les services de diététique, de cuisine et de logopédie. L’application de cette méthode nous permet aujourd’hui de proposer aux patients dysphagiques des textures adéquates, gourmandes et adaptées au risque de dénutrition.
Article rédigé par Ombline van der Hoeven – Logopède & diététicienne aux Cliniques de l’Europe.
Pour toutes questions, n’hésitez pas à envoyer un e-mail à l’adresse suivante : o.vanderhoeven@cdle.be
Article rédigé avec l’aide du support visuel PowerPoint de Nolwenn Leduf - Logopède aux Cliniques de l’Europe.
L’IDDSI est « une classification des textures alimentaires et hydriques destinée aux personnes dysphagiques ou qui présentent un trouble de la déglutition d’après l’expertise d’un·e logopède ». Le projet IDDSI est né en 2013, et c’est deux ans plus tard, en 2015, que le premier manuel descriptif des textures a été créé.
Les textures IDDSI des aliments et des boissons sont présentées sous forme de pyramide inversée comme suit :
La création du projet IDDSI a été motivée par deux grands objectifs :
Ces objectifs ont pour but d’optimiser la prise en charge des patients dysphagiques, d’éviter les risques d’inhalation/étouffement grâce à la modification des textures mais aussi de lutter contre le haut risque de dénutrition présent par défaut chez ces patients.
L’implémentation de l’IDDSI au sein d’un établissement est possible grâce à une collaboration étroite entre l’équipe de diététiciens, de logopèdes, de la cuisine et des déglutologues.
Le projet a démarré en décembre 2019 et s’est déroulé en trois temps :
1/La récolte de données sur l’IDDSI et l’analyse des infrastructures destinées à son implémentation.
2/Les textures ont fait l’objet d’un inventaire afin de pouvoir énumérer les différentes (nouvelles) textures que la clinique souhaitait inclure.
3/De nombreux tests ont eu lieu en cuisine, en présence de logopèdes, diététicien·ne·s et du personnel de cuisine. L’objectif était de créer des préparations qui respectent les spécificités de chaque stade de l’IDDSI tout en tenant compte du goût, de la composition nutritionnelle et de la logistique en cuisine.
Au total, quatre cycles de menus différents par saison ont été créés. C’est finalement le 1er avril 2022 que le projet a réellement démarré aux Cliniques de l’Europe.
Le projet est né en deux ans et demi. Cependant, des ajustements de textures, menus et préparations ont encore régulièrement lieu. De plus, la texture IDDSI 3 (purée fluide) n’a pas encore été mise en place bien qu’elle fasse partie des projets futurs.
Lorsque les nouvelles textures ont été introduites au sein des Cliniques de l’Europe, une présentation du projet et des spécificités de l’IDDSI a été réalisée par les logopèdes et diététicien·ne·s pour le service infirmier.
Temps : Étant donné l’ampleur du projet et le nombre de personnes concernées par celui-ci, sa mise sur pied a pris beaucoup de temps. En effet, l’équipe s’est réunie plusieurs fois pour échanger sur la méthodologie et pour réfléchir aux freins et limites potentiels que ce changement allait engendrer.
Cuisine : Il a fallu former le personnel de cuisine car les normes recommandées par l’IDDSI sont précises et spécifiques. Nous entendons par cela la technique de cuisson (par exemple sous-vide pour que l’aliment soit tendre), la taille des morceaux, la texture des préparations mixées, etc. Tout ceci nécessite une réorganisation et de nouvelles techniques de travail pour le personnel de cuisine.
Coût : Le coût des produits a fait l’objet d’une difficulté avec par exemple le coût du pain timbale, l’adaptation/l’ajout d’aliments dans les fiches techniques, l’achat de mixeurs spécifiques, etc.
Priorité thérapeutique : Lorsqu’une texture modifiée ainsi qu’une alimentation thérapeutique doivent être combinées, un choix entre les deux est parfois requis pour une question de faisabilité technique. Par exemple, aux Cliniques de l’Europe, un patient diabétique avec une texture IDDSI 4 (purée lisse) recevra une préparation à base de Cérélac® (Nestlé) avec de la compote, du lait et du sucre et non pas de l’édulcorant. En effet, il n’est pas toujours réalisable de respecter la texture ET l’alimentation thérapeutique car cela engendrait trop de dérivés à cuisiner. Il a été convenu au sein de notre établissement, que la texture prendrait le dessus.
Pour pouvoir aller jusqu’au bout du projet, il semble essentiel de poursuivre la formation de chaque personne concernée : les infirmier·e·s, le personnel de cuisine, les diététicien·ne·s, les logopèdes et le service ORL.
Un réajustement des recettes/préparations est indispensable pour éviter l’accentuation de la dénutrition chez des patients déjà à haut risque. Cela, en révisant les fiches techniques par exemple, ou en proposant de nouvelles recettes adaptées aux différentes textures.
Il serait également intéressant de proposer aux patients dysphagiques, une fiche de sortie reprenant les informations clés concernant la texture adaptée ainsi que des idées de préparations ou des journées types enrichies.
Bibliographie
The International Dysphagia Diet Standardisation Initiative (2019), Disponible à l’adresse suivante : www.iddsi.com (consulté le 03 mars 2023)
La splendeur de toutes ces verdures qui s’éveillent dans la nature nous incite à commencer une cure de printemps, une purification qui nous apporte santé et rafraîchissement. C’est aussi pour cette raison-là que, chaque année, le retour de l’ail des ours est attendu avec ferveur.
Pauline de Voghel, diététicienne agréée. www.paulinedevoghel.be, info@paulinedevoghel.be
Selon une croyance populaire, les ours se délectent de l’Allium ursinum à la sortie de leur hibernation afin de se purger. Ce nom qui lui a été donné, ne ferait-il pas plutôt référence au fait que tous deux partagent le même type d’habitat ? L’ail des ours préfère, en effet, les sous-bois de feuillus, frais, humides et ombragés. On peut le retrouver dans des fonds de vallons ou des talus et cuvettes forestières. C’est au bord de petits cours d’eau, de sources naturelles qu’il s’étend majoritairement. L’ail des ours, aussi appelé ail sauvage, ail des bois ou ail à larges feuilles, fait partie de la famille des Amaryllidaceae, comme le poireau des vignes ou l’ail des vignes, etc. Dès le mois de mars, vous le verrez pousser par centaines, voire par milliers, formant un véritable tapis végétal d’un vert éclatant et offrant aux promeneurs des paysages à en couper le souffle. En avril, il sort ses ombelles sphériques de fleurs en étoiles, d’un blanc pur, donnant à ses colonies un air de champ bucolique.
Cette herbacée vivace pouvant mesurer jusqu’à 45 cm, présente une tige semi-cylindrique, pleine, dressée, lisse et d’un vert pâle. Elle porte en son sommet un pompon de fleurs blanches, à 6 pétales. Insérées à la base de cette tige, de mars à juin, poussent 2 à 3 feuilles souples, fines et fragiles, tendres et sans poils, d’un vert vif, luisantes sur le dessus et mates sur le dessous. Elles ressemblent à des lances de 2 à 6 cm de large et leurs nervures sont parallèles, la principale étant saillante en dessous. Les fruits, présents de mai à juin, forment des capsules à 3 loges arrondies contenant chacune 2 à 3 graines noires sphériques. Le bulbe blanc et coriace, en fuseau, ressemble à un petit oignon élancé, entouré de peaux blanches et transparentes. À ces critères de reconnaissance, ajoutons le plus déterminant : la plante sent l’ail !
Il serait fâcheux de confondre notre ail des ours avec l’une de ces plantes toxiques : le muguet (Convallaria majalis L.) dont les feuilles sont plus coriaces et d’un vert plus mat. Ses fleurs en clochettes pendantes enlèvent les derniers doutes, mais elles n’apparaissent que plus tard dans la saison. Autres plantes toxiques : l’Arum tacheté ou le Gouet tacheté (Arum maculatum) qui a l’habitude de se glisser discrètement parmi l’ail des ours, les Colchiques (colchicum multiflorum ou C. automnale), les fleurs de Dame-d’onze-heures, la Scille fausse Jacinthe (Scilla lilio-hyacinthus) et la Jacinthe des bois. Le point commun de toutes ces plantes-là : elles ne sentent pas l’ail.
L’ail des ours contient une haute teneur en vitamine C (1, 3, 7, 8, 11, 12), lui conférant des propriétés antioxydantes, stimulantes du système immunitaire et facilitant l’assimilation du fer (1). Il contient également de la vitamine B1, B2 (8), de l’acide folique (3), de la vitamine E (8), du magnésium (1), du fer (1, 8), du sodium (8) et du zinc (8).
Les Romains consommaient en salade cette « herba salutaris » ou l’herbe salutaire. Maria Treben ajoutait d’ailleurs qu’« aucun simple de cette terre n’a un tel effet lors de la purification de l’estomac, de l’intestin et du sang ». Hildegarde de Bingen (1098 à 1179) parle de lui comme la « viriditas » : « la force qui fait tout croître, pousser et grandir ».
L’ail des ours a plusieurs fonctions intéressantes : il est immunostimulant, anti-inflammatoire (1), antiseptique (1, 5, 12, 13) – grâce à ses hétérosides sulfurés et à l’allicine – et antioxydant grâce aux flavonoïdes (1, 8). Il agit contre les troubles cardiaques (6) et l’artériosclérose (6, 11, 12, 13) en étant antiagrégant plaquettaire – grâce aux ajoènes-, hypocholestérolémiant (1, 13, 15), hypotenseur (1, 3, 6, 10, 13) et vasodilatateur (1). Sur le plan digestif, c’est une plante carminative (1), apéritive et régulatrice du transit intestinal (en cas de diarrhées chroniques et aiguës ou de constipation) (1, 11, 12, 13). Il est cholérétique et cholagogue (1). On décrit également des propriétés intéressantes dans la détoxication de l’organisme et en tant que protecteur hépatique (1), dépuratif et purificateur au printemps (1, 6, 11, 12, 15), diurétique (1, 5, 6, 7, 11) et soulageant les crises de goutte (1).
Pour pérenniser les précieuses colonies d’ail des ours, on cueille avec parcimonie la quantité qu’il est prévu de consommer, une seule feuille par pied et sans les déraciner (sauf pour prélever le bulbe) pour qu’il puisse repousser. Éviter de tasser la terre tout autour, en marchant précautionneusement et sans faire des allers-retours aléatoires. Toutes ses parties sont comestibles :
– Les feuilles sont plus digestes, plus tendres, plus savoureuses, plus douces, plus riches en substances actives avant la floraison.
o On les utilise volontiers crues en salade, en aromate, en houmous, en beurre persillé, en pesto, en jus ou macérées dans l’huile ou le vinaigre. Elles peuvent être conservées au sel et entrent dans la confection de sauces et de vinaigrettes, de marinades, etc. Elles assaisonnent à merveille les plats de légumes et de céréales et les salades de pommes de terre, les soupes printanières, les viandes et les poissons, les sandwichs et le fromage frais aux fines herbes, etc.
o Cuites (ajoutées en fin de cuisson), elles égaient les potages, les omelettes, les poêlées de légumes. Elles sont délicieuses sautées ou fondues à la poêle avec un peu de sel et d’huile d’olive ou de crème à la façon des épinards. On les retrouve aussi dans la réalisation de tourtes aux pommes de terre, de quiches, de tartes, de crêpes, de cakes, etc.
– Les jolies fleurs sont ajoutées aux salades pour leur goût relevé et piquant et pour les décorer. On peut en farcir des petits pains et les utiliser dans la majorité des préparations proposées avec les feuilles.
– La hampe florale de consistance croquante est délicieuse en accompagnement, peut être conservée au vinaigre, sautée minute ou cuite en bottes à la vapeur avec ses boutons.
– Les boutons floraux s’utilisent comme des câpres, confits ou macérés au vinaigre, à l’huile ou au sel.
– Les jeunes fruits verts, frais, sont d’excellents condiments.
– Les graines noires sont utilisées à la façon graines de pavot.
– Le bulbe, récolté parcimonieusement en automne et en hiver, est assez dur, mais juteux et peut être haché en condiment comme la gousse d’ail ou les oignons. Il peut idéalement être cuit à l’eau ou à la vapeur.
On le préfère cru, pour conserver les principes actifs, ainsi que son goût prononcé, agréablement piquant et légèrement sucré, qui rappelle aussi l’oignon doux et la ciboulette.
Huile parfumée à l’ail des ours : Recouvrir d’un litre d’huile, 100 g d’ail des ours lavé, bien séché et haché. Rien ne doit dépasser. Laisser macérer 24 h dans une pièce chaude, mais protégée des rayons du soleil. Secouer et remuer de temps en temps. Filtrer l’huile, presser le résidu et verser dans un flacon en verre foncé. Conserver au frais, au sec et à l’abri de la lumière.
Boutons-câpres d’ail des ours : Dans un petit poêlon, porter à léger frémissement : 150 ml d’eau, 300 ml de vinaigre de cidre, 30 g de sucre de canne, 1 c. à c. de sel, 5 grains de poivre noir, 1 c. à s. de graines de coriandre, 1 c. à s. de moutarde en remuant pour bonne dissolution. Répartir 250 g de boutons floraux d’ail des ours, minutieusement lavés, égouttés et essuyés, dans 3 bocaux de 250 ml soigneusement stérilisés. Recouvrir du mélange du vinaigre chaud. Fermer les couvercles et conserver 3 semaines dans un endroit frais et sec à l’abri de la lumière, avant de les consommer.
Pesto des bois : Pour une consistance « tartinable », mixer ensemble 100 g de feuilles d’ail des ours bien nettoyé et séché, 100 g de graines de tournesol préalablement trempées et rincées, 100 g de parmesan, 100 ml d’huile d’olive, du sel et du poivre. Pour une consistance plus liquide, augmenter la proportion d’ail des ours ou diminuer (voire retirer) celle des graines de tournesol et/ou de parmesan.
Salade de lentilles à l’ail des ours : Tremper 200 g de lentilles pendant quelques heures. Les cuire dans 3 x leur volume d’eau avec de la sarriette. Rincer et mélanger dans un saladier à la vinaigrette réalisée avec 1 c. à s. de sauce shoyu, 1 c. à s. de moutarde à l’ancienne, 2 c. à s. d’huile d’olive, 1 c. à s. de vinaigre balsamique, le zeste d’un citron très finement haché, du sel aux herbes et 6 feuilles d’ail des ours hachées finement.
Crème d’asperges à l’ail des ours : Cuire 250 g d’asperges vertes à la vapeur pendant 15 min. Les mixer avec 1 poignée d’ail des ours, 1 œuf cuit dur, 2 c. à s. de purée de sésame, 1 c. à s. d’huile, du sel et du poivre, jusqu’à l’obtention d’une mousse bien fine. Placer dans des verrines et mettre au frais. Au moment de servir, parsemer de graines de courge grillées et décorer d’une fleur d’ail des ours.
Longuettes d’ail des ours : Pétrir 200 g de farine, 2 g de sel, 8 g de levain déshydraté et 150 ml d’eau. Incorporer 20 g de beurre mou. Puis ajouter et bien incorporer 100 g de feuilles et de bulbe d’ail des ours, bien nettoyé, essuyé et haché finement et 40 g de fromage râpé. Laisser reposer au frigo pendant 30 minutes. Séparer en 8 parts égales. Allonger chacune d’elles en boudin de l’épaisseur d’un stylo. Passer un peu d’eau au pinceau et les rouler dans des graines de sésame. Couper aux ciseaux des petits tronçons de 5 cm, et les poser sur une plaque de cuisson, les recouvrir d’un torchon propre et les laisser se développer 45 minutes. Cuire 15 minutes à 240°C.
Granola salé forestier : Mélanger dans un saladier, 120 g de flocons d’avoine avec 100 g de graines au choix, légèrement grillées à sec dans une poêle. Ajouter un blanc d’œuf, 50 g de parmesan, et 2 c. à s. d’huile d’olive, 2 c. à s. d’ail des ours séché et réduit en poudre, 1 pincée de gros sel et mélanger de nouveau. Couvrir une grande plaque de papier cuisson et répartir le mélange sur toute la surface en l’étalant bien. Enfourner pour 30 min à 160°C, et remuer le mélange à mi-cuisson. À la sortie du four, laisser totalement refroidir avant de le mettre en bocal.
Gratin d’ail des ours au sarrasin : Faire revenir 100 g de champignons coupés en tranches, dans une poêle avec du beurre clarifié, à feu vif. Mélanger, dans un saladier 200 ml d’eau, 100 ml de crème, 1 c. à s. de tamari, 1 c. à c. de bouillon de légumes cru, 100 g de sarrasin, 1 pincée de paprika, du clou de girofle, 150 g de feuilles d’ail des ours émincées. Étaler cette préparation, avec les champignons, dans un plat beurré allant au four. Cuire 45 minutes à 180°C.
Êtes-vous aussi convaincus que l’ail des ours est un des aulx sauvages des plus appréciés ? Tant pour son goût prononcé, mais davantage raffiné que celui de l’ail que pour sa présence généreusement abondante ? Bien identifié, bien nettoyé et minutieusement préparé, il embellit nos assiettes, régale toute la famille et prend soin de notre santé dès la sortie de l’hiver.
Bibliographie
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2/ Quataert, L. (2009). Introduction de plantes sauvages comestibles locales et printanières dans l’alimentation (TFE diététique). Haute Ecole Vinci, Bruxelles.
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4/ Lieutaghi, P. (1996). Le livre des bonnes herbes. Actes sud.
5/ Couplan, F. (2012). La cuisine est dans le pré. Soliflor.
6/ Treben, M. (2012). La santé à la pharmacie du Bon Dieu. Conseils d’utilisation des plantes médicinales. Ennsthaler
7/ Couplan, F. et Styner, E. (2009). Guide des plantes sauvages comestibles et toxiques. Delachaux et Niestlé SA.
8/ Moutsie & Ducerf, G. (2013). Récolter les jeunes pousses des plantes sauvages comestibles. Editions Terran.
9/ Fitter, R., Fitter, A. & Blamey , M. (2002). Les guides du naturaliste. Guide des fleurs sauvages (7è éd.). Edition Dalachaux et Niestlé SA.
10/ Londres, C. (2010). Cuisine les plantes sauvages. Editions Dangles.
11/ Scherf, G. (2008). Des plantes médicinales dans votre jardin. Chantecler
12/ Laporte, F. (2017). Les plantes des Druides. Rustica édition.
13/ Beiser, R. (2013). Créer un jardin de Plantes médicinales. Ulmer.
14/ Laïs, E. (2013). Grimoire des plantes de sorcières. Editions Rustica.
15/ Louis, L. (2011). L’appel gourmand de la forêt. Editions la plage.
16/ Bissegger, M. (2012). La cuisine des plantes sauvages. Ulmer.
17/ Sulpice, J. (2015). Assiette sauvage. Le cherche midi éditeur.
18/ Couplan, F. (2010). Cuisine sauvage, accommoder mille plantes oubliées. Sang de la terre.
19/ Delaunay, B. (2007). Grignotages sauvages. Editions de Terran.
20/ Veyrat, M. & Couplan, F. (1997). Herbier Gourmand. Hachette pratique.
21/ Maehlum, A. (2016). Eat nature, l’herbier gourmand. Michel Lafon.
22/ Cuisine sauvage asbl. Découvrez les plantes comestibles. Retrived from www.cuisinesauvage.be
Le « Roi des chemins » sur lequel nous marchons si fréquemment sans y porter la moindre attention, est pourtant depuis toujours une bénédiction pour l’humanité. Son usage thérapeutique remonte au moins à la Grèce antique. Découvrons qui se cache derrière cette plante d’apparence si banale.
Pauline de Voghel, diététicienne agréée. www.paulinedevoghel.be, info@paulinedevoghel.be
Dans le monde, il existe 200 espèces de plantain, dont cinq en Belgique. Les plus courants forment une tribu de trois frères : le « petit gros », le Plantago media ; le « grand mince », le Plantago lanceolata dont nous parlons ici ; et le Plantago major, dit le « grand costaud ». Ces 2 derniers peuvent être confondus sous un seul nom dans la pratique, tant par leur composition nutritionnelle que par leurs vertus médicinales très similaires.
Notre Plantago lanceolata, appelé aussi « oreille de lièvre » ou « herbes à cinq coutures » (faisant référence à ses cinq nervures filandreuses caractéristiques, presque parallèles et très saillantes sur la face inférieure des feuilles) est une plante vivace de 10 à 60 cm se dressant en touffes de rosettes denses et dressées à la base. Elles repoussent rapidement après avoir été coupées, ce qui facilite amplement la cueillette. La plante ne présente pas de tige, seulement une hampe florale au sommet de laquelle sont réunies une multitude de petites fleurs en épi. Les feuilles épaisses et allongées en forme de fer de lance sont entières, au sommet pointu, et se rétrécissent graduellement à la base.
Le Plantago Major, aussi appelé le Plantain des oiseaux tant ses graines les régalent, est la « plante pied » car il indique – et donc préfère – un sol plus compacté que les autres espèces de plantain. Il se distingue du lancéolé en formant des rosettes davantage étalées au sol. Son inflorescence en épi est beaucoup plus allongée et peut atteindre voire dépasser la taille de la hampe qui la porte. Ses feuilles largement ovales et obtuses, pouvant atteindre 30 cm de hauteur, de texture épaisse, sont légèrement pourvues de poils très courts. Le pétiole, la tige de la feuille, est ferme, large et presque plus long que la feuille elle-même.
Le plantain, largement distribué à travers le monde entier, préfère des milieux ouverts de type friches, prairies, champs et bords de chemin, lisières de bois ou de forêt, jardins, décombres ou fossés et terre inculte humide.
Tableau 1 : Valeurs nutritionnelles moyennes pour 100g de Plantain lancéolé (1, 3)
Les feuilles et les inflorescences ont un délicieux et remarquable goût partagé entre le champignon frais et l’épinard. Sa légère amertume (surtout à maturité) lui confère beaucoup de caractère.
Les trois principales espèces de plantain (P. lanceolata, major et media) constituent de très bons légumes.
Préférons les jeunes feuilles (ou les repousses au cœur de la rosette) qui sont assez tendres pour être servies crues en salade ou en jus de légumes. Elles offrent de nombreuses possibilités et se marient très bien avec du fromage frais, hachées finement, etc. Lactofermentées, les feuilles de tous les plantains font une excellente choucroute.
Les feuilles plus âgées sont de consistance un peu moins agréable, plus coriaces et au goût un peu plus amer. Elles restent très bonnes une fois cuites, en soupe roborative ou en légumes à la façon des épinards, suées à la poêle dans l’huile d’olive et de l’ail ou intégrées dans des préparations de type omelette, quiche, galette, etc.
Les jeunes inflorescences du plantain lancéolé (épis noirs avant ouverture des fleurs) se consomment crues en salade ou de toutes les manières utilisées pour les jeunes feuilles. Saisies à la poêle, elles donnent l’impression d’un concassé de champignons. Elles rentrent bien dans la préparation d’une omelette, d’une galette ou d’une quiche. Ou simplement grillées et hachées en condiment. Cuites en beignets ou utilisées comme les câpres, blanchies au vinaigre.
Toast aux champi-plantain : 2 poignées d’épis noirs légèrement concassés, poêlés dans l’huile d’olive avec des échalotes, du poivre, du sel, du thym et du citron et une crème végétale ou animale, à servir sur des toasts.
Épis en sauce : Épis noirs sautés à sec ou à l’huile d’olive consommés en salade avec des feuilles de plantain fraiches hachées, du parmesan et des amandes effilées, le tout assaisonné avec de l’ail, de l’huile d’olive et du vinaigre.
Pesto de derrière les fagots : 50 g de jeunes feuilles de plantain lancéolé hachées (éventuellement blanchies) puis réduites en purée dans un mortier avec 3 c. à s. (cuillère à soupe) d’huile d’olive, 1 pincée de sel marin. Mélanger avec 20 g de noix hachées, 20 g de pecorino écrasé et du poivre noir.
Fromage blanc au plantain et aux herbes : Mélanger ensemble 150 g de fromage blanc entier, 4 c. à s. de feuilles de plantain hachées très finement, 1 c. à s. de ciboulette émincée, 1 c. à s. d’origan, 1 c. à s. de lierre terrestre, 1 c. à c. (cuillère à café) de zeste d’orange, 2 c. à s. huile d’olive.
Tarte plantain-ortie : Abaisser 250 g de pâte brisée et en foncer un moule à tarte. La précuire 5 minutes puis y déposer 50 g de noisettes moulues puis 200 g de plantain et 200 g d’orties, blanchis, égouttés et puis hachés. Ensuite 50 g de raisins secs coupés grossièrement, à recouvrir d’un appareil réalisé à l’aide de 2 œufs battus avec 250 ml de jus végétal ou de lait et 2 c. à s. de miel. Cuire la tarte 25 minutes à 180°C.
Salade de lentilles beluga aux herbes : Cuire 200 g de lentilles beluga et 3 feuilles de laurier dans un grand volume d’eau froide. Porter à ébullition et laisser cuire environ 20 minutes. Égoutter, rincer à l’eau froide pour stopper la cuisson. Les mélanger dans un saladier avec quelques herbes très finement émincées : 6 c. à s. de plantain, 2 c. à s. d’aillet, 2 c. à s. de persil, 3 c. à s. d’oseille, 1 c. à s. de feuilles d’estragon et 3 c. à s. de basilic. Ajouter en remuant délicatement la vinaigrette réalisée à partir de 4 c. à s. d’huile de cameline, 1 c. à s. de vinaigre balsamique, 1 c. à s. de moutarde à l’ancienne, 1 c. à s. de tamari, 1 c. à c. de zeste de citron.
Salade folle des prairies : Laver 4 bouquets de chacune de ces plantes : plantain, stellaire, laiteron, lamier tacheté ou des salades et autres légumes à feuilles du commerce. Confectionner 4 bouquets du mélange et les lier avec des brins de ciboulette blanchies. Les arroser d’une vinaigrette : 1 c. à s. d’huile de noisette et 3 de noix, 1 c. à s. de vinaigre balsamique, 1 c. à m. (cuillère à moka) de pâte de bouillon miso, le zeste d’une demi orange et son jus.
Beignets de hampes de plantain : Mélanger intimement 125 g de farine avec 60 ml de bière et 1 pincée de sel. Laisser reposer 15 minutes au réfrigérateur après avoir ajouté 15 g de beurre fondu. Incorporer ensuite 2 blancs d’œufs battus en neige. Tremper dans cette pâte à beignet, une trentaine de hampe florale de plantain lancéolé. Les saisir 1 minute de chaque côté dans de l’huile pour friture, dans une poêle à rebord. Les égoutter dans un papier absorbant avant de les servir.
Aussi réputée que répandue depuis les temps les plus anciens, Dioscoride, ce célèbre médecin grec en parle déjà au 1er siècle avant J.-C. La phytothérapie actuelle a rendu justice à cette plante que le XIXe siècle avait méprisée malgré son passé glorieux. Les paysans, eux, n’ont jamais cessé de leur faire confiance : le plantain reste l’une des quelques plantes sauvages les plus connues des campagnes.
Les plantains lancéolé et majeur contiennent :
Le plantain est aussi surnommé « l’herbe aux charpentiers », « le fil d’or » qui recoud littéralement les plaies. Il les assainit et les cicatrise, qu’elles soient fraîches ou enflammées, récentes ou anciennes. Voici une très belle plante vulnéraire encore appréciée dans les milieux paysans actuellement, grâce à l’ensemble de ces propriétés :
Pour ce faire, il suffit d’appliquer directement sur la plaie des feuilles nettoyées et suffisamment froissées pour en extraire le suc.
Le plantain est également un bon anti-histaminique qui calme littéralement les piqûres d’insectes et d’orties, et un anti-allergique contre le rhume des foins, par exemple.
Il soigne aussi les affections des intestins grâce à la couche de mucilages qui les recouvre (ingérer les graines après plusieurs heures de trempage dans l’eau afin de ramollir le tégument (enveloppe du grain) et pour permettre aux mucilages qu’il contient de se transformer en gel émollient).
Les graines des plantains peuvent servir de laxatif mécanique, comme celles du psyllium, un plantain de Méditerranée. Astringent et adoucissant, utile dans la diarrhée et la dysenterie : il régularise les selles tout en calmant l’irritation du tube digestif.
C’est également un bon dépuratif, diurétique et tonique amer.
Enfin, il est reconnu comme astringent, anti-inflammatoire et expectorant pour les affections des voies respiratoires supérieures : maux de gorge, irritations oro-pharyngées, laryngites, etc. Il calme la toux sèche par son effet antispasmodique sur les muscles lisses des bronches et il facilite l’expectoration tout en agissant comme un reconstituant général.
Il n’y a aucune contre-indication à ce jour, malgré quelques rares cas isolés d’irritation cutanée qui ont été rapportés. Des effets emménagogues observés in vitro font que l’usage de cette plante n’est pas recommandé pendant la grossesse.
Apprenez à reconnaître le plantain, ce grand roi des chemins, et vous le verrez partout ! Même en hiver, là où la nature nourricière est censée se faire un peu plus discrète. Il n’attend qu’à être apprivoisé par l’homme auquel il rend d’innombrables services.
Bibliographie
(1) Le chemin de la Nature. (2011). Page d’accueil. Retrieved from https://www.lechemindelanature.com/
(2) Couplan, F., Styner, E. (2009). Guide des plantes sauvages comestibles et toxiques. Delachaux et Niestlé.
(3) Couplan, F. (2011). Guide nutritionnel des plantes sauvages et cultivées. Les guides du naturaliste. Delachaux et Niestlé.
(4) Couplan, F. (2020). Guide de la survie douce. Vivre en pleine nature. Sang de la Terre.
(5) Moustie., Ducerf, G. (2013). Récolter les jeunes pousses des plantes sauvages comestibles. Terran.
(6) Couplan, F. (2012). La cuisine est dans le pré. Soliflor.
(7) Lieutaghi, P. (1996). Le livre des bonnes herbes. Actes sud.
(8) Couplan, F (2010). Cuisine sauvage, accommoder mille plantes oubliées. Sang de la terre.
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(10) Treben, M. (2007). La santé à la pharmacie du Bon Dieu. Conseils d’utilisation des plantes médicinales. Ennsthaler.
(11) Ameenah, G.-F. (2014). Toutes les plantes qui soignent. Michel Lafon
(12) Veyrat, M., Couplan, F. (1997). Herbier Gourmand. Hachette pratique.
(13) Duke J. (2002). Handbook of Medicinal Herbs (2nd Edition). Washington : CRC Press.
Le parcours initiatique de l’obésité ou de l’excès de poids chez un·e patient·e s’accompagne systématiquement d’une transformation intime, de la découverte de nouvelles valeurs et s’accompagne souvent de souffrance. Le critère de temps est nécessaire à l’initiation et à la maturation. Vous trouverez différents itinéraires pour accompagner votre patient·e dans ces quelques lignes non exhaustives.
Dorothée Demoiny, diététicienne agréée aux Cliniques Universitaires UCL Saint-Luc de Bruxelles et diététicienne indépendante
Nous sommes dans un contexte où les régimes font grossir et sont dangereux ; le rapport de l´Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) en 2010 montre clairement l’inefficacité des régimes dans le traitement de l’obésité ainsi que leur nocivité pour la santé physique et mentale. La reprise pondérale concerne 80 % des sujets à un an, et davantage à plus long terme. Les déséquilibres nutritionnels induits ont des effets délétères multiples et en particulier sur le capital osseux, la masse musculaire, le profil lipidique ou encore la fonction rénale. Les contraintes inhérentes au régime perturbent les mécanismes de régulation du comportement alimentaire favorisant le développement de différents troubles psycho-émotionnels comme la restriction cognitive. Elle est considérée comme la complication la plus courante de la pratique des régimes amaigrissant.
Être en Restriction Cognitive (RC), c’est essayer de contrôler son alimentation par un effort de volonté, dans le but de maigrir ou de ne pas grossir. Cet effort est très difficile à maintenir dans le temps. L’état de RC provoque ainsi frustration si le régime est respecté, culpabilité s’il ne l’est pas, et risque d’induire une prise de poids ou une impossibilité à en perdre. Tous les régimes, équilibrés ou non, induisent une reprise de poids bien souvent supérieure à la perte, aggravent les complications médicales liées au poids, entraînent une mésestime de soi renforcée par les échecs répétés et quasi systématiques de chaque tentative de perte de poids et installent des troubles des conduites alimentaires (TCA) ou les amplifient.
Si les effets des régimes sont connus (troubles du comportement alimentaire, gain de poids, etc.), La compréhension de ce qui fait que le régime génère ces troubles, ces prises de poids l’est beaucoup moins. Pour éviter de donner des conseils qui, sans porter le nom de régime, ont les mêmes effets que celui-ci (« rééquilibrage », « faire attention »), il est nécessaire de savoir ce qui définit un régime et en quoi celui-ci dérègle le comportement alimentaire et génère l’aggravation de l’excès pondéral. Ces dernières années, la recherche en physiologie et psychologie a permis une connaissance plus fine du comportement alimentaire. Ces nouvelles données ont permis à la fois de comprendre les raisons de l’échec du modèle restrictif, qui continue pourtant à être largement prescrit, et aussi d’engager une autre approche du surpoids, conforme et respectueux de la physiologie du comportement alimentaire. C’est dans ce cadre qu’est né l’approche établie conjointement par les Docteur Zermati et Docteur Apfeldorfer. Le premier est médecin nutritionniste et psychothérapeute spécialiste du comportement alimentaire. Le second est psychiatre et psychothérapeute spécialiste depuis 30 ans dans le traitement des troubles du comportement alimentaire et des problèmes pondéraux. Ils fondent en 1998 l’association « Groupe de Réflexion sur l’Obésité et Surpoids » et mettent au point une méthode originale pour aborder en profondeur les problèmes alimentaires et pondéraux et mettre fin aux prises alimentaires émotionnelles.
Plusieurs domaines sont principalement concernés dans les problématiques liées au surpoids :
Pas de remède miracle mais l’abandon de la conception diététique classique au profit d’une approche basée sur trois axes :
1/ Traiter la restriction cognitive, c’est-à-dire aider à manger selon ses sensations alimentaires, de tout et sans culpabilité.
2/ De reconnaître la souffrance émotionnelle et augmenter la tolérance aux inconforts émotionnels pour faire face a l’impulsivité alimentaire.
3/ Faire un travail d’acceptation, d’estime et d’affirmation de soi.
Le GROS construit et met à jour depuis plus de 20 ans une formation qui s’appuie sur des bases scientifiques solides et qui a pour but la transmission de nouvelles compétences aux praticiens pour un meilleur accompagnement de ses patients. Son objectif est de permettre aux professionnels au contact avec des patients souffrant d’excès pondéral mais également de troubles des conduites alimentaires, de mieux comprendre les phénomènes de dérégulation qu’engendre les conseils alimentaires classiques et d’accompagner les patients vers un comportement alimentaire régulé au plus près de leur physiologie humaine. Cette formation s’étend sur une année avec un examen à la clé. Elle aborde des thèmes divers et variés, tels que la pleine conscience, la communication, les techniques d’affirmation de soi, la thérapie de troisième vague telle que la thérapie d’acceptation et d’engagement (ACT), l’auto compassion. Cette prise en charge est applicable aussi bien pour les adultes que pour les enfants et les adolescents.
C’est une approche différente qui est à l’écoute du corps, qui aborde des concepts différents et complémentaires dans le but de traiter la restriction cognitive, de reconnaître la souffrance émotionnelle et d’augmenter la tolérance aux inconforts émotionnels pour faire face à l’impulsion et enfin de faire un travail d’acceptation, d’estime et d’affirmation de soi.
En conclusion générale, bien que de nombreux points communs étant abordés sous des angles différents et complémentaires, l’approche globale de l’obésité se fait de manière individuelle en représentant toutes ces approches imbriquées les unes dans les autres. Elles ont leurs spécificités et à la fois leurs différences majeures. Un approfondissement de la part du thérapeute selon ses attirances personnelles et son feeling pour l’une ou l’autre approche, est peut-être un bon cheminement personnel pour accompagner son patient à son « poids idéal ». A l’image d’un insecte qui, regardé de face a deux pattes, regardé de côté en a 3 et regardé du dessus en a 6, tout dépend du point de vue initial de l’obésité ou du trouble alimentaire.
Bibliographie
Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. (2021). Régimes amaigrissants : entretien. Retrieved from https://www.anses.fr/fr/content/r%C3%A9gimes-amaigrissants-entretien
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Groupe de Travail «Évaluation des risques liés à la pratique de régimes à visée amaigrissante ». (2010). Évaluation des risques liés aux pratiques alimentaires d’amaigrissement. Rapport d’expertise collective. Anses. Retrieved from https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2009sa0099Ra.pdf
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Tribole, E. (2021). Intuitive Eating for Every Day: 365 Daily Practices & Inspirations to Rediscover the Pleasures of Eating. San Francisco : Chronicle Prism.
Tribole, E., Resch, E., Huber, H. (2020). Alimentation intuitive, une approche anti-régime révolutionnaire (4ème éd.). Blackstone Publishing.
Le parcours initiatique de l’obésité ou de l’excès de poids chez un·e patient·e s’accompagne systématiquement d’une transformation intime, de la découverte de nouvelles valeurs et s’accompagne souvent de souffrance. Le critère de temps est nécessaire à l’initiation et à la maturation. Vous trouverez différents itinéraires pour accompagner votre patient·e dans ces quelques lignes non exhaustives.
Dorothée Demoiny, diététicienne agréée aux Cliniques Universitaires UCL Saint-Luc de Bruxelles et diététicienne indépendante
Méthode d’application dans le domaine de l’obésité ou comment cette approche peut apporter une réduction de la reprise pondérale ?
L’objectif de cet article n’est pas de démontrer l’efficacité de l’ETP dans le domaine des pathologies chroniques telles que l’obésité. Il existe des meta-analyses et des études randomisées comparant une prise en charge habituelle à un programme d’ETP. La littérature ne permet d’ailleurs de répondre ni à la question du contenu et à la définition des activités éducatives, ni à la question du type d’adaptation des programmes d’ETP en général, et en particulier dans les situations de polypathologies dont fait partie l’obésité. Les durées de suivis étant limitées pour les patients, il n’existe pas de réponse claire à la question des types de dispositifs qui permettent aux patients de maintenir leurs compétences dans le temps. La littérature montre l’intérêt d’adapter au mieux l’ETP à chaque patient, mais dans le respect d’une démarche structurée et planifiée. Cet article sera centré sur les aspects de définition, les étapes de la démarche d’ETP, le contenu du programme d’ETP et son évaluation.
La définition retenue par la Haute Autorité de Santé (HAS) en 2007 et par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en 1998 est :
« Elle vise à aider les patients à acquérir ou à maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec leurs maladies chroniques. Elle fait partie intégrante et de façon permanente de la prise en charge du patient. Elle comprend des activités organisées, y compris un soutien psycho social, conçu pour rendre les patients conscients et informés de leur maladie. Des soins, de l’organisation et des procédures hospitalières ainsi que des comportements liés à la santé et à la maladie. Ceci a pour but de les aider, ainsi que leurs familles, à comprendre leur maladie et leurs traitements, collaborer ensemble et assurer leur responsabilité dans leur propre prise en charge, dans le but de les aider à maintenir et améliorer leur qualité de vie ».
Les finalités de l’ETP sont l’acquisition et le maintien par le patient de compétences d’auto-soins et l’acquisition de compétences d’adaptation. Contrairement aux idées reçues, l’ETP se distingue d’une information orale ou écrite telle qu’un conseil, un message de prévention, ou encore une consultation ou un acte de soins. Il s’agit d’une participation du patient à la prise de décision.
Pour qui ?
Plusieurs types de populations peuvent être concernés par l’ETP : les enfants et leurs parents, les adolescents, les adultes ayant une maladie chronique quel que soit leur âge, le type ou le stade d’évolution de la maladie.
Par qui ?
Différents niveaux d’interventions dans la démarche d’ETP sont possibles pour les professionnels de la santé et nécessite une coordination et une transmission d’information. Il est donc préférable et recommandé qu’il soit mis en œuvre par des professionnels de santé formés à la démarche de l’ETP, aux techniques de communication et aux techniques pédagogiques qui permettent d’aider le patient à acquérir des compétences d’auto-soins et d’adaptation, au travail en équipe et à la coordination des actions.
En résumé, l’ETP répond aux aspects suivants :
Il s’agit d’élaborer un diagnostic éducatif, de définir un programme personnel, de planifier et de mettre en œuvre des séances d’ETP individuelles ou collectives en alternance, de réaliser une auto-évaluation des compétences acquises, tout au long du déroulement du programme.
Il existe un organigramme structurant la prise en charge, via l’ETP, d’un patient dont la maladie chronique a été diagnostiquée. On peut retrouver ce-dernier dans le Guide méthodologique de juin 2007 de la HAS et de l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé (INPES) « Structuration d’un programme d’éducation thérapeutique du patient dans le champ des maladies chroniques » (page 16).
En conclusion, l’obésité nécessite une prise en charge multidisciplinaire sur le long terme associant très souvent une approche cognitivo-comportementale à des enseignements diététiques et de l’activité physique afin d’éviter la reprise pondérale. La prise en charge de l’obésité appelle des solutions nouvelles pour aider les patients à vivre au mieux avec la maladie. L’ETP offre des perspectives originales en situant l’être humain, dans toute sa complexité, au cœur des préoccupations de l’équipe soignante.
Bibliographie
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Ritz, P., Hanaire, H., Estrade, A. (2013). Classeur pédagogique d’un programme d’éducation thérapeutique de proximité pour les patients obèses (OBEPROX). Centre Intégré de l’Obésité Midi-Pyrénées.
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Le parcours initiatique de l’obésité ou de l’excès de poids chez un·e patient·e s’accompagne systématiquement d’une transformation intime, de la découverte de nouvelles valeurs et s’accompagne souvent de souffrance. Le critère de temps est nécessaire à l’initiation et à la maturation. Vous trouverez différents itinéraires pour accompagner votre patient·e dans ces quelques lignes non exhaustives.
Dorothée Demoiny, diététicienne agréée aux Cliniques Universitaires UCL Saint-Luc de Bruxelles et diététicienne indépendante
Il n’est plus nécessaire de présenter les thérapies de troisième vague (dites cognitivo-comportementales). Plus besoin de présenter la pleine conscience ou « Mindfullness » qui utilise la méditation laïque pour venir en aide aux personnes souffrant de certaines pathologies psychologiques et physiques. Elle a été déclinée afin d’être utilisée dans différentes pathologies comme pour l’approche des groupes de « Mindfulness-Based Eating Awarness Training » (MB-EAT) qui est un entraînement au ressenti alimentaire par la pleine conscience. Ce programme de groupe, créé dans les années 1990 par Jean Kristeller, professeur en psychologie, consacre une grande partie de ses recherches sur les troubles des conduites alimentaires, et notamment les « Binge Eating Disorder » (BED ou en français, frénésie alimentaire ou encore hyperphagie boulimique). Il ne s’agit donc pas de crises aiguës suivies de vomissements accompagnées de comportements compensatoires (purgatifs, vomissements, etc.) mais de grignotages permanents. Le BED désigne une consommation alimentaire excessive, une suralimentation, ainsi que ses traitements. Le programme MB-EAT se base sur le travail de John Kabat-Zinn à propos du programme « Mindulness-Based Stress Reduction » (MBSR). Il s’agit d’un programme constitué d’une approche éducative qui vise, par un apprentissage expérientiel, à développer l’aptitude à répondre plus efficacement au stress, à la douleur et à la maladie en invitant les participants à se relier à leurs ressources internes. L’adaptation française de ce programme américain est, encore une fois, très différente !
Dans cet article consacré à l’alimentation consciente, nous n’aborderons pas une méthode mais bien le développement d’un pôle de compétences permettant l’accès à un bien-être tout en s’entraînant. Nous tenterons notamment de réduire les compulsions alimentaires ou les grignotages intempestifs.
En pratique, les participants au groupe s’engagent à une présence à l’ensemble des séances hebdomadaires. Ils ont par ailleurs des exercices à faire quotidiennement. Cette pratique est très orientée vers le travail sur les sensations alimentaires et les émotions. Plusieurs conseils organisationnels sont à mettre en place :
L’alimentation consciente fait face au pilotage automatique qui conduit la personne et l’amène à « prendre conscience de ce qu’elle fait et de ce qu’elle ressent ».
Au-delà de la dégustation que l’on ne présente plus, sont abordés l’approche de la balance et ses pensées induites ainsi que le scan corporel ou la méditation par le « balayage corporel ». Une fois la conscience du pilotage automatique révélée, la faim physique et émotionnelle peuvent entrer en action. La recherche de la faim, perçue comme « désagréable » chez les personnes ayant fait un ou des régime·s ou étant en restriction alimentaire, la recherche des stratégies d’évitement ainsi que la mise en place d’un travail sur certains de ces fardeaux est le début de la prise en charge de type MB-EAT. Les moyens proposés sont : une mini-méditation (espace de respiration) sur la balance et son ressenti.
Des « tests » présentés comme des questionnaires d’auto-évaluation permettent au patient de progresser dans sa démarche, mais aussi d’évaluer le chemin parcouru. Quel n’est pas celui qui ne « se voit pas avancer » mais qui, quand on lui pose la question « qu’avez-vous déjà acquis jusqu’ici ? », revoit son point de vue à la hausse.
La notion de satiété peut entrer en ligne de compte une fois la familiarisation des perceptions de faim physique et de faim émotionnelle acquises. Chaque semaine, une auto-évaluation est proposée. La démarche peut à tout moment faire remonter des émotions ou des pensées désagréables. C’est là que la proposition de la méditation en pleine conscience est conseillée afin de mieux les accepter, de leur laisser de la place, de surfer sur la vague des émotions. Un renforcement des acquis est proposé en milieu de cycle. Ensuite les choix, l’écoute des sensations alimentaires et enfin les émotions sont travaillés avec bienveillance.
L’intégration d’un volet diététique aborde la dégustation de certains aliments souvent moins consommés par le patient et faisant partie des familles alimentaires les moins représentées telles que les légumes ou les fruits. Ensuite la dégustation virtuelle d’un buffet peut également être proposée.
La pleine conscience en mouvement (méditer en marchant ; se promener dans la nature et méditer en parallèle ; etc.) est alors abordée, ce qui est l’essentiel du programme de « manger en pleine conscience ». Le but est de permettre d’améliorer les compétences dans des circonstances où le patient est confronté à ses difficultés. L’introduction au mouvement est proposée aux moyens d’exercices inspirés du yoga. L’intégration de la pleine conscience au quotidien étant installée, le but sera de prendre conscience de ce que l’on fait et de ce que l’on ressent. Et ainsi, d’agir plus par choix que par réaction.
Au terme de cette expérience, et de la variabilité au changement en ce qui concerne le vécu par rapport à l’alimentation, deux vérités s’offrent :
La pratique formelle de la pleine conscience est acquise par l’habitude de méditer, plusieurs fois par jour par le biais des mini-méditations, lorsque les émotions risquent de prendre le dessus, mais également par la pratique d’autres exercices telles que le yoga ou la méditation marchée. La pratique informelle doit rester un réflexe lors des ressentis des actes au quotidien, en particulier pendant les repas en faisant le point sur les émotions grâce au cycle émotionnel.
En conclusion, on peut dire que, en général, la paix avec la nourriture est mise en place. La pratique nécessite patience et persévérance. Le conseil est la culture « des petits pas ». Des moments de lassitude arrivent et bousculent le mental, c’est là qu’il faut tenir bon, le soutien mutuel peut être une piste. Il s’agit cependant d’un travail de l’attention, une sorte de sport du cerveau dont l’entraînement est nécessaire, ce qui lui confrère quelques limites.
On peut pratiquer la pleine conscience et l’alimentation en pleine conscience dans une optique de régime amaigrissant et de perte de poids. On peut également manger en pleine conscience et renforcer sa pleine conscience en méditant pour éviter d’avoir envie de manger ou faim.
L’alimentation intuitive est une forme de mentalisation, de posture du thérapeute, du travail de l’attention centré sur l’intérieur qui peut s’avérer irrité, contraint par ses émotions.
L’alimentation en pleine conscience est une forme de méditation, d’entraînement de l’attention, qui peut entretenir la restriction cognitive ainsi que l’évitement des envies de manger émotionnelles (EMÉ).
De plus en plus de personnes mentalisent l’alimentation intuitive avant d’entrer en consultation. Leur attention devient alors de plus en plus difficile à déconnecter. Ceci est à ajouter à la pression et aux attentes des patients de manger moins et de perdre du poids, mais aussi du risque de renforcer leurs restrictions cognitives ou leurs évitements dans leurs envies de manger émotionnelles. C’est à ce niveau qu’il est intéressant d’introduire le concept d’auto-compassion ou bienveillance envers soi-même retrouvé dans l’approche du GROS avec son système Bio-Psycho-Sensoriel (BPS – cette approche sera définie ultérieurement) et donc de l’acceptation du poids, de l’alimentation en pleine conscience « non jugeante ». C’est ainsi que l’auto-compassion devient la plus-value de cette alimentation en pleine conscience. Le renforcement de la confiance de son corps et de son ressenti permet une évolution d’une relation sereine.
Bibliographie
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